Dix ans après la parution de « Résurrection », la première partie d’un diptyque accouché dans la douleur, voici enfin « Révélations » : conclusion du dernier récit du regretté Philippe Tome, décédé alors qu’il travaillait sur les dernières pages de son scénario. Les éditions Dupuis proposent, enfin, l’intégralité de cette aventure magistralement dessinée par Dan Verlinden, digne successeur de ses deux prédécesseurs : Luc Warnant et Bruno Gazzotti.
Lire la suite...« Torpedo 1972 » : Lucas Torelli, 36 ans après…
Tueur à gages au sang froid, Lucas Torelli, plus connu sous le sobriquet de Torpedo, a régné sur la pègre de New York au milieu des années Trente. Toujours accompagné par le stupide Rascal qui le vénère, homme à tout faire peu scrupuleux, le tueur méthodique au visage anguleux est de retour. Sexagénaire attaqué par la maladie de Parkinson, il n’a rien perdu de sa méchanceté. Un come back à ne pas manquer.
Quelques kilos de plus, tout le fric amassé disparu, l’appartement spacieux au coeur de Manhattan troqué contre une piaule miteuse, la limousine avec chauffeur remplacée par une Ford Mustang d’occasion, Lucas Torelli n’est plus que l’ombre de lui-même. Seul le fidèle Rascal et sa passion pour la gent féminine n’ont pas changé. S’il se considère comme un retraité, faisant fructifier sa propre légende et acceptant des « commissions » qu’il effectue sans rechigner, le Torpedo de 1972 affirme vouloir rester longtemps en vie. Ce n’est pas la maladie de Parkinson qui handicape sa main gauche qui l’empêche de jouer de la gâchette.
James Holliday, un jeune journaliste et sa fiancée Wendy Durban, une photographe renommée, qui enquêtent sur Piero Caputo, lui demandent des renseignements sur le gangster que Torpedo aurait abattu au temps de sa splendeur. Alors que les vieux démons du passé refont surface, la famille Caputo entend bien se venger. Sale temps pour le vieux tueur, d’autant plus qu’au cours d’une séance de pose, il viole la jolie Wendy, on ne se refait pas, qui elle aussi crie vengeance. Heureusement, Rascal, qui lève le coude comme personne, veille sur son vieux pote…
Héros, si l’on peut dire, de 15 albums publiés entre 1983 et 2004, Torpedo revient 15 ans plus tard … avec 36 années de plus. Adieu 1936, bonjour 1972, année où Marlon Brandon de Francis Ford Coppola triomphe sur les écrans avec « Le Parrain ». Enrique Sanchez Abuli, né en 1945 en Espagne en est toujours le scénariste. Créé en 1982 dans le magazine espagnol Creepy, publié en France dès l’année suivante dans l’Écho des Savanes Spécial USA, « Torpedo » est créé graphiquement par l’américain Alex Toth qui illustre seulement les deux premières courtes histoires.
De son trait puissant et nerveux aux noirs et blancs superbes, Jordi Bernet né en 1944 en Espagne anime tous les autres épisodes de la série.
Pour ce retour, tout en conservant le même scénariste, « Torpedo » change sans pour autant perdre de son efficacité. Héros d’histoires le plus souvent courtes en noir et blanc, il est ici embarqué dans une longue aventure en couleurs riche en rebondissements. Au dessin Jordi Bernet est remplacé par l’argentin Eduardo Risso né en 1959 (« Fulu », « 100 Bullets », « Je suis un vampire », « Batman », « Spider-Man »…). Il propose un Torpedo génial, victime des ravages du temps, respectant la ligne graphique originelle tout en conservant la propre personnalité de son trait. Un retour réussi pour cette histoire à l’humour noir glaçant dont on peut regretter une lecture peut-être un peu rapide mais c’était déjà le cas pour le premier cycle.
Pour les amoureux du noir et blanc, l’éditeur propose deux versions de ce récit, en noir et blanc et en couleurs. Outre l’histoire en 44 planches l’album de 64 pages présente un prologue signé Abuli, une nouvelle (« Oeuvre de charité ») et un cahier de recherches et esquisses.
Henri FILIPPINI
« Torpedo 1972 » par Eduardo Risso et Enrique Abuli
Éditions Vents d’Ouest (12,50 €) – ISBN : 9 782749309064