Les amateurs de son œuvre le savent bien : Jacques Tardi est un boulimique de travail qui dessine matin, midi et soir. Or, « Dessins matin, midi et soir », c’est le titre d’un beau petit recueil édité par Oblique Art (structure dirigée par Pierre-Marie Jamet) qui nous propose pas moins de 160 pages rassemblant des illustrations réalisées par le créateur d’« Adèle Blanc-Sec », sélectionnées dans les nombreux carnets qu’il a noircis (voire mis en couleurs) tout au long de sa remarquable carrière d’auteur du 9e art : croquis, études de personnages… et même courtes bandes dessinées iconoclastes inédites.
Lire la suite...« Mirages » de Will : monumental !
408 pages, 2 230 kg, 5 centimètres d’épaisseur, un ouvrage au format 22 x 29,7 cm : tel est le monument de (beau) papier édifié à la gloire de Will. Même si sa modestie aurait pu en souffrir, le créateur de Monsieur Choc méritait bien cet ouvrage, conçu avec passion et érudition par Vincent Odin, aux éditions Daniel Maghen.
Né le 30 octobre 1927 à Anthée, dans la province de Namur (Belgique), le jeune Willy Maltaite se rêve très tôt une vocation artistique. A 14 ans, il devient l’élève de Joseph Gillain ( alias Jijé), qui règne en maître dans les pages du jeune hebdomadaire Spirou. Le futur Will y côtoie Franquin et Morris, qui eux aussi font leurs gammes auprès de Jijé. Après la publication de l’album « Le Mystère du Bambochal », il se voit confier la reprise de « Tif et Tondu », des personnages créés par Fernand Dineur, qui lui scénarise ses premières histoires. C’est dans cette série, qu’il dessinera jusqu’en 1990, qu’il campe en 1955 le personnage mythique de Monsieur Choc, avec la complicité de Maurice Rosy au scénario.
Décoriste talentueux, Will travaille sur « Spirou et Fantasio » pour Franquin et « Benoît Brisefer » pour Peyo. Il crée « Isabelle », en 1970, avec Franquin, Macherot et Delporte, puis dessine ses premiers albums coquin, pour la collection Aire libre (« L’Appel de l’enfer », « La 27° lettre ») et trouve encore, dans l’intervalle, le temps de créer des héros éphémères : « Record et Véronique », « Éric et Artimon », « Lili mannequin »… Coloriste chevronné, il se passionne aussi pour la peinture, privilégiant les jolies femmes dénudées et les paysages méridionaux. Cette riche carrière prend fin avec son décès, le 18 février 2000, alors qu’il travaillait sur les premières planches de « L’Arbre des deux printemps » : un album terminé par ses amis dessinateurs.
« Mirages », une somme à la mise en page aérée et soignée, revient chronologiquement sur la longue carrière de Will, à l’aide de reproductions d’originaux et autres documents rares ou inédits. Il consacre un chapitre copieux aux peintures au lavis, à l’aquarelle, puis à l’huile, dont l’auteur disait « Je ne suis pas un peintre du dimanche…peut-être du samedi ». Graphiste et illustrateur, Vincent Odin a choisit de parsemer l’ensemble d’extraits de  propos tenus par Will dans les magazines spécialisés (Spirou, Tonic, Les Cahiers de la BD, Rêve en bulles, Hop !…), tout au long de sa carrière. C’est, ainsi, toute une vie consacrée à la bande dessinée qui défile sous nos yeux ébahis ; au fil des pages de ce très beau livre d’images.
Après Laurent Vicomte, André Juillard, Cosey, Maurice Tillieux et Tibet, la collection Biographies en images des éditions Daniel Maghen, c’est une évidence, se devait d’accueillir ce grand modeste qu’était Willy Maltaite, dessinateur emblématique de l’hebdomadaire Spirou.
Si, après ce merveilleux  voyage en images, vous souhaitez vous offrir un original, ou plus modestement admirer les planches originales, la Galerie Daniel Maghen (47, Quai des Grands Augustins, 75006 Paris), organise une exposition de quelques 70 documents originaux, du 24 novembre au 16 décembre 2017. Pour information, la couverture originale de l’album « Tif et Tondu contre la main blanche » s’est vendue 68 760 € en 2015, lors d’une vente organisée par Daniel Maghen pour Christies.
Henri FILIPPINI
« Mirages » par Will
Éditions Maghen (59 €) – ISBN : 978 235674 053 3
Pas encore vu ce livre, mais s’il est aussi beau que le Tillieux, Daniel Maghen fera peut être oublier son rôle dans la vente de dizaines de planches de Jacobs, évoqué dans les pages de Casemate et sur le net…..