Les amateurs de son œuvre le savent bien : Jacques Tardi est un boulimique de travail qui dessine matin, midi et soir. Or, « Dessins matin, midi et soir », c’est le titre d’un beau petit recueil édité par Oblique Art (structure dirigée par Pierre-Marie Jamet) qui nous propose pas moins de 160 pages rassemblant des illustrations réalisées par le créateur d’« Adèle Blanc-Sec », sélectionnées dans les nombreux carnets qu’il a noircis (voire mis en couleurs) tout au long de sa remarquable carrière d’auteur du 9e art : croquis, études de personnages… et même courtes bandes dessinées iconoclastes inédites.
Lire la suite...« Geisha ou le jeu du shamisen » T1 par Christian Durieux et Christian Perrissin
Ce séduisant premier volet d’un diptyque très prometteur nous dévoile le monde fascinant des geishas : des femmes aussi belles que cultivées, qui pratiquaient l’art de la musique, de la danse et du chant, constituant ainsi l’un des piliers de la très codée société japonaise du début du XXe siècle…
Un couple et leurs deux filles décident de quitter leur village dans les montagnes pour tenter de trouver une vie meilleure dans la grande ville portuaire voisine, en pleine expansion. Porté sur la boisson et piètre gestionnaire, le père, un ancien samouraï devenu menuisier, ne réussira qu’à plonger sa famille dans la pauvreté. Pour ne rien arranger, il est victime d’un accident et devient unijambiste : il ne trouvera plus jamais de travail. La mère, contrainte d’accepter de faire des ménages, finit par se prostituer pour subvenir aux besoins de sa famille. Finalement, l’homme de la maison, diminué, se résout à vendre sa fille aînée à la propriétaire d’une maison de geishas, située dans le quartier des plaisirs. La jeune Tsuda Setsuko, rebaptisée Kitsune, pense qu’elle va donc devenir une courtisane de luxe, car c’est ainsi que la plupart des gens définissent les geishas à cette époque. Cependant, elle sera d’abord la servante de ces dames, avant de devenir geisha elle-même, grâce à la dextérité qu’elle montrera dans la pratique du shamisen : une guitare à trois cordes.
Superbement narré par un Christian Perrissin (voir « Martha Jane Cannary » T3 [« Les Dernières années 1877-1903 »], « Les Munroe » T3 [« Les Larmes de Kibera »], « Kongo » ou « Le Vent des cimes ») qui s’est manifestement beaucoup documenté sur le sujet et qui use avec parcimonie et efficacité du récitatif, ce récit tragique et touchant baigne dans une ambiance douce et gracieuse. Ceci est surtout dû au graphisme rond de Christian Durieux, sublimé par l’utilisation du noir et blanc : une esthétique maîtrisée, qui se rapproche de celle de certains mangas, et qui est tout à fait agréable à l’œil.
« Geisha ou le jeu du shamisen » T1 par Christian Durieux et Christian Perrissin
Éditions Futuropolis (14,99 €) – ISBN : 978-2-27548-1216-0