Les amateurs de son œuvre le savent bien : Jacques Tardi est un boulimique de travail qui dessine matin, midi et soir. Or, « Dessins matin, midi et soir », c’est le titre d’un beau petit recueil édité par Oblique Art (structure dirigée par Pierre-Marie Jamet) qui nous propose pas moins de 160 pages rassemblant des illustrations réalisées par le créateur d’« Adèle Blanc-Sec », sélectionnées dans les nombreux carnets qu’il a noircis (voire mis en couleurs) tout au long de sa remarquable carrière d’auteur du 9e art : croquis, études de personnages… et même courtes bandes dessinées iconoclastes inédites.
Lire la suite...« Retour sur Belzagor » T1 par Laura Zuccheri et Philippe Thirault, d’après Robert Silverberg
Ce diptyque est une adaptation minutieuse et intelligente par Philippe Thirault (« Miss », « Mille Visages », « Mandalay ») des « Profondeurs de la Terre » : roman fondateur de Robert Silverberg (né en 1935) publié aux États-Unis en 1970. Une critique sans concession du racisme ambiant de l’époque face à la décolonisation toujours d’actualité.
Âgé de 21 ans, le lieutenant Eddie Gundersen débarque sur la terre de Holman, exo planète de classe VII qui connaît, alors, l’âge d’or de sa colonisation. Le jeune homme est placé sous les ordres du terrible commandant Kurtz, chargé de récolter le venin des Naggiards, produit miracle recherché par les riches terriens. Deux espèces intelligentes dominent sur la planète : les Nildoror et les Sulidoror. Les premiers sont herbivores, calmes et pacifiques, aussi imposants que des pachydermes. Les seconds, bipèdes de près de trois mètres, sont carnivores et possèdent de puissantes griffes et dents. Si les Nildoror s’expriment par un grognement nasal, les Sulidoror parlent une langue incompréhensible pour les terriens.
Renvoyé sur Terre pour de mystérieuses raisons au moment de la décolonisation, Eddie Gundersen revient dix-huit ans plus tard sur Holman, qui a retrouvé son nom indigène, Belzagor. Il accompagne Dorothy et Sam Wingate : un jeune couple de scientifiques peu scrupuleux. Leur ambition secrète est de filmer le rituel de la renaissance des Nildoror : cérémonie se déroulant au pays des Brumes, aux confins des terres indigènes, interdite aux terriens. Cette expédition au cœur de la jungle se révélera hasardeuse, d’autant plus qu’Eddie retrouve un Kurtz abruti par les drogues, marié à Seena sa promise, abandonnée sur Holman avant son départ précipité.
La dessinatrice italienne Laura Zuccheri, née en 1971 (« Julia » pour Sergio Bonelli Editore) et qui a déjà travaillé pour les Humanoïdes associés (« Les Épées de verre » avec Sylviane Corgiat), propose des planches superbes à la nature luxuriante, aux paysages oniriques, aux personnages attachants, tout particulièrement en ce qui concerne les populations indigènes. Les couleurs chaudes de Silvia Fabris ajoutent une note de crédibilité et de cohérence à ce monde fantastique.
Robert Silverberg, mui même n’hésite pas à déclarer qu’il « aime beaucoup le résultat de cette adaptation. Le dessin y est puissant, subtilement érotique par endroit et la représentation de la planète Belzagor y est très riche. Le scénario prend forcément certaines libertés par rapport à mon livre, mais c’est bien normal, car les récits en bandes dessinées, comme les films, ont leurs propres exigences. » Que dire de plus, sinon que nous attendons avec impatience le second volume annoncé pour octobre prochain ?
« Retour sur Belzagor » T1 par Laura Zuccheri et Philippe Thirault, d’après Robert Silverberg
Éditions Humanoïdes associés (14,50 €) – ISBN : 978-2731652864
Une édition spéciale limitée à 300 exemplaires a été publiée, destinée aux libraires et à la presse