Les amateurs de son œuvre le savent bien : Jacques Tardi est un boulimique de travail qui dessine matin, midi et soir. Or, « Dessins matin, midi et soir », c’est le titre d’un beau petit recueil édité par Oblique Art (structure dirigée par Pierre-Marie Jamet) qui nous propose pas moins de 160 pages rassemblant des illustrations réalisées par le créateur d’« Adèle Blanc-Sec », sélectionnées dans les nombreux carnets qu’il a noircis (voire mis en couleurs) tout au long de sa remarquable carrière d’auteur du 9e art : croquis, études de personnages… et même courtes bandes dessinées iconoclastes inédites.
Lire la suite...« Un tout petit bout d’elles » par Raphaël Beuchot et Zidrou
Une grande partie de l’Afrique noire et de l’Afrique de l’Est est concernée par une barbarie sans nom : les mutilations génitales féminines (excision, infibulation…). C’est ce sujet qu’abordent Zidrou et Beuchot dans ce « Tout petit bout d’elles », euphémisme joliment poétique pour désigner l’organe du plaisir féminin mis à mal par des traditions insupportables…
Au Congo, de nos jours, un ouvrier chinois, Yue Kiang, s’est amouraché d’Antoinette, une belle Congolaise déjà maman d’une petite Léontine. Une communauté asiatique importante vit en effet dans des baraquements en marge d’une concession forestière isolée dont le patron voit d’ailleurs d’un très mauvais œil les relations avec les autochtones. Yue Kiang n’en a cure et retrouve régulièrement Antoinette finissant par découvrir le secret, intime, honteux, que des femmes infligent aux fillettes pour respecter la « coutume ». Antoinette pourra-t-elle épargner à sa petite Léontine cette infâme « blessure », humiliante et traumatisante à vie ?
Le sujet n’était sûrement pas facile à traiter puisqu’il fallait non seulement l’aborder d’un point de vue documentaire (un dossier très complet et très concret traite du phénomène en fin d’ouvrage), mais aussi en faire partager l’horreur par le biais de personnages suscitant l’empathie, le tout sans mièvrerie ni faux-semblant. Les auteurs ont donc fait le choix de dialogues adultes assez crus quelquefois, lors de conversations d’ouvriers par exemple, alternant avec des séquences plus sensibles ou émouvantes. Pour ne pas enfermer l’histoire dans ce seul sujet, ils ont élargi le récit à l’exploitation excessive des forêts et surtout à la vie quotidienne africaine : les maisonnettes, les rues terreuses, les petits commerces, les proverbes aussi…
Zidrou considère qu’il s’agit là  de la fin de sa trilogie africaine commencée avec « Le Montreur d’histoires » et poursuivie avec « Tourne-disque », deux titres tout aussi réussis et savoureux que l’actuelle parution (voir nos chroniques sur BDZoom.com : « Le Montreur d’histoires » par Beuchot et Zidrou et « Tourne-Disque » par Raphaël Beuchot et Zidrou).
Comme l’Afrique colle à la peau de Zidrou, ce dernier n’a pu s’empêcher de l’inviter dans « L’Adoption », le tout nouvel album réalisé avec Arno Monin qui évoque la relation qui s’installe peu à peu entre un « grand-père » et l’enfant adopté par son fils (voir « L’Adoption : Qinaya » T1 par Arno Monin et Zidrou). Éblouissant de justesse et de sensibilité, ce premier tome du diptyque met en scène de temps à autre un restaurant africain, « Le Sénégal », où des septuagénaires ont leurs petites habitudes…
Alors, « bon » voyage !
Didier QUELLA-GUYOTÂ ([L@BD-> http://9990045v.esidoc.fr/] et sur Facebook).
http://bdzoom.com/author/didierqg/
« Un tout petit bout d’elles » par Raphaël Beuchot et Zidrou
Éditions  Le Lombard (17, 95 €) – ISBN : 978-2-8036-3581-8
« L’Adoption T1 : Qinaya » par Arno Monin et Zidrou
Éditions Grand Angle (14, 90 €) – ISBN : 978-2-81893-603-0
Incroyable qu’une Bd parle de cette pratique !
Merci pour votre article ! En parler c’est le début du combat …
Plasticienne engagée, j’ai réalisé une Å“uvre intitulée « Infibulation » sur le sujet des mutilations sexuelles féminines que j’ai pu présenter à 400 lycéens français pour la Journée des Femmes 2018. L’action est aussi la pédagogie et le débat.
A découvrir : https://1011-art.blogspot.fr/p/blog-page.html
Mais aussi une oeuvre plus pudique intitulée « Noli me tangere » sur l’inviolabilité du corps de la femme : https://1011-art.blogspot.fr/p/noli-me-tangere.html