« Flash, la légende » T1 par Carmine Infantino, John Broome et Robert Kanigher

Avec ce nouveau titre, Urban Comics nous permet – au-delà de l’intérêt qu’on peut avoir ou non pour le super-héros Flash – de nous replonger dans un moment clé de l’évolution des comics : la fameuse époque charnière entre l’Âge d’Or et l’Âge d’Argent qui allait faire renaître les super-héros, après une période catastrophique pour ceux-ci. Véritable pierre angulaire de l’histoire des comics, ces épisodes de « Flash » des fifties sont donc pour nous l’occasion d’accéder en intégralité à ce qui allait révolutionner le genre…

Oui, même si l’on n’aime pas Flash, ce nouveau cycle de ses aventures paru au milieu des années 1950 reste totalement incontournable pour qui veut comprendre et appréhender à juste titre l’histoire des comics au XXe siècle. Le contexte est connu : après un Âge d’Or culminant dans les années 1940, souvent en symbiose avec la seconde guerre mondiale où les super-héros participèrent de manière flamboyante à l’effort de guerre, il y eut un certain désintérêt de la part du lectorat, puis le maccarthysme qui enfla jusqu’à polluer profondément la société américaine, entre chasse aux sorcières et conservatisme agressif. Le fameux ouvrage de Fredric Wertham, « Seduction of the innocent », était passé par là, fustigeant les comics censés dévoyer la jeunesse et la rendre décadente, violente. Les EC Comics, notamment, en furent pour leurs frais, et un puritanisme ambiant étouffa dans l’œuf bon nombre de velléités artistiques… Les super-héros finirent pas disparaître presque totalement, et les éditeurs étaient à juste titre assez frileux. D’où un titre comme « Showcase » qui permit à DC Comics de s’essayer à plusieurs nouveaux héros sans prendre trop de risques, la revue accueillant différents personnages sans que ceux-ci aient à s’embarquer dans leur propre titre. Dans « Showcase » #4, à l’automne 1956, Flash fit donc son retour quelques années après l’arrêt de son titre (« Flash » #104 en 1949), même si le Flash de l’Âge d’Or et de l’Âge d’Argent ne sont plus la même personne…

Pour ce retour (ou plutôt cette renaissance, ou cette réinvention), sous l’égide de Julius Schwartz, des auteurs ayant déjà fait leurs preuves allaient être conviés. Robert Kanigher et John Broome aux scénarios, et Carmine Infantino aux dessins. Pour Infantino, ce fut aussi un tournant historique dans sa carrière, le menant tout droit à ce qu’il allait devenir pour DC Comics durant l’Âge d’Argent : bien plus qu’un dessinateur ! En effet, qu’il s’agisse de graphisme, de design ou de maquette, Infantino marqua son époque en instaurant une esthétique à la fois dynamique et lisible, participant pleinement à l’identité visuelle de l’éditeur. Sa fameuse couverture du « Showcase » #4 contenait déjà tout ce qui allait faire sa renommée, redonnant du peps à un genre devenu moribond et annonçant l’énergie à venir dans le milieu… Assisté par le grand Joe Kubert dans les deux premiers épisodes (Frank Giacoia prendra le relais dès le numéro 8 de « Showcase »), Infantino va en effet insuffler une véritable dynamique au sein de ce titre, au point de redonner vie au genre super-héroïque. Et bien sûr, c’est dans « Flash » #123 en 1961 que le légendaire épisode « Flash of two worlds » va paraître, initiant le concept de Terres parallèles (vous pourrez le lire dans le prochain volume de cette édition). Bref, tout ceci est extrêmement historique !

Pas moins d’une trentaine d’épisodes de « Flash » (mais aussi de « Kid Flash » !) sont présents dans ce premier volume, parus entre 1956 et 1960. Plus de 400 pages d’aventures débridées sous le signe de la vitesse et de l’action, avec une galerie de super-vilains plutôt cocasses qui ne gâchent rien au plaisir de cette lecture rafraîchissante… C’est donc entre excitation et amusement (avec par exemple cet épisode intitulé « Le Jour où Flash pesa cinq cents kilos » : eh oui, on ne se permettrait plus ça aujourd’hui !!!), qu’on relira ces récits pétulants ! Patrimonial !

Cecil McKINLEY

« Flash, la légende » T1 par Carmine Infantino, John Broome et Robert Kanigher

Éditions Urban Comics (35,00€) – ISBN : 978-2-3657-7805-3

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