« Histoires du quartier T2 : Chemins » par Bartolomé Seguí et Gabi Beltrán

C’est l’été, les plages, la Méditerranée… Et pourquoi pas les Baléares et Palma de Majorque, sa capitale, mais dans les années 1980 et vus du côté des habitants ? Voilà en tout cas ce que proposent Bartolomé Seguí et Gabi Beltrán dans « Histoires du quartier », dont c’est le deuxième volume. Leurs tranches de vie racontent la vraie vie, celle qui ne fait pas de quartier justement, car les héros sont des gens ordinaires, une vie qu’ils ont bien connue puisque les auteurs sont tous deux natifs de Palma…

Dans le premier tome, paru en 2013, on les rencontrait alors adolescents en pleines années 1980, découvrant de plus près le quartier des prostituées et les Américains dont les porte-avions mouillaient à quelques encablures. Dollars et petites pépées, mais aussi l’Ailleurs, le voyage ! Tout un programme pour ces petites têtes désœuvrées nées dans des milieux très populaires et qui s’essayaient à tout : les cigarettes, les bandes de copains, les bagarres, le vol de voitures, la découverte du sexe, la haine ou la loi du plus fort…  Autant de saynètes urbaines où les auteurs ne se cachaient pas, n’enjolivaient pas, bref ne jouaient pas les stars.

Rien n’a changé pour ce deuxième volet : ils se racontent sans complaisance, avec sincérité, souvent avec émotion. Actes de délinquance et sentiment de marginalité n’empêchent pas de grandir, de se poser des questions : faut-il fuir ? Faut-il avoir peur ? Comment faire pour changer la vie, de famille, quitter l’univers étriqué de la Plaza Mayor ? Comment s’échapper quand on n’a pas un sou ? Comment s’échapper sans tomber dans la marginalité, la délinquance ?

Les réponses ne sont pas simples et il fallait un certain courage pour se lancer dans cette autobiographie sans complaisance et qui parvient à rendre sympathiques tous les personnages.

Parallèlement aux saynètes en bande dessinée, dès le premier tome, le scénariste évoquait de façon romanesque la vie de son père, simple ouvrier, dont il racontait la fin au fil d’un texte littéraire égrainé entre les séquences dessinées. Même principe dans ce volume, mais au sujet de sa mère, femme violente et malheureuse dont Gabi Beltran raconte la pauvreté, les errances, la maladie… De son côté, Bartolomé Seguí croque simplement (son narrateur est un Tintin au visage extrêmement schématisé) mais efficacement (ruelles ou campagnes des Baléares sont joliment rendues). Il avait déjà dessiné ces contrées, sur scénario de Ramón de España, dans « Le Rêve mexicain » (Paquet, 2004) ou l’histoire d’Oscar, trafiquant de tableaux qui, pour échapper à des gangsters auxquels il devait de l’argent, embarquait pour… les Baléares ! Encore des personnages en souffrance et des situations conflictuelles d’une Espagne inhabituelle et d’îles méditerranéennes qui ont bien changé depuis… Du même dessinateur, il faut signaler « Les Mains obscures de l’oubli » sur le séparatisme basque et les enjeux politiques qu’il suppose (Dargaud, 2014) et « Les Racines du chaos » réédités récemment et on a parlé ici-même (cf. chronique).

Alors, bon voyage…

Didier QUELLA-GUYOT  ([L@BD->http://www.labd.cndp.fr/] et sur Facebook).http://bdzoom.com/author/didierqg/

« Histoires du quartier T2 : Chemins » par Bartolomé Seguí et Gabi Beltrán

Éditions Gallimard, collection Bayou (18 €) – ISBN : 978-2-07-065019-4

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