N’hésitez pas à revenir régulièrement sur cet article, puisque nous l’alimenterons, jour après jour, avec tout que nous envoient nos amis dessinateurs, scénaristes, coloristes, libraires, organisateurs de festivals et éditeurs pour vous souhaiter de joyeuses fêtes : et ceci jusqu’à la fin du mois de janvier 2024 !
Lire la suite...« All you Need is Kill » T1 & 2 par Takeshi Obata
Le futur : une invasion d’extraterrestres décime les forces armées terriennes pourtant prêtes à en découdre. Ces Mimics semblent pouvoir anticiper chaque attaque et chaque mouvement des combattants humains. Une seule guerrière a réellement réussi à s’imposer dans cette guerre sans merci : Rita Vrataski. Une jeune recrue du nom de Keiji Kiriya va également compter dans ce conflit. Celui-ci, tout comme Rita en son temps, est pris dans une boucle temporelle qui le fait revenir au début de sa journée dès qu’il meurt. Ce pouvoir, qu’il ne devrait pas avoir, il l’a hérité d’un Mimic. C’est grâce à ce subterfuge que les aliens ont pu analyser les mouvements des soldats terriens et les anticiper. Keiji va faire de même. Combien de fois va-t-il devoir revivre sa mort et espérer terrasser l’ennemi ?
Les boucles temporelles sont un classique de la science-fiction. Ce procédé scénaristique est intéressant, il montre le pouvoir, que nous avons, d’influencer le cours des événements en changeant de comportement jours après jour. Un peu comme dans un jeu vidéo où l’on repasse sans cesse au même endroit, jusqu’a déjouer, un à un, tous les pièges laissés par l’adversaire. Dés le départ, le héros de cette histoire, Keiji Kiriya, se réveille en sursaut : il vient de rêver de ce qui allait se passer le jour même. Pire, il s’est vu mourir dans l’attaque suicidaire que son escadron a entreprise pour contrer l’invasion de la Terre par les Mimic. Ce n’est qu’au bout de la cinquième fois qu’il comprend, clairement, que ce n’est pas un simple rêve. Il a vraiment vécu ce combat, il est vraiment mort, et parfois de manière cruelle ou dans d’horribles souffrances. Il prendre son destin en mains et se sert de cette opportunité contre l’ennemi. Lorsqu’il comprend que Rita Vrataski a gagné son plus prestigieux combat en étant, elle aussi, enfermée dans une autre boucle, il ira la convaincre d’échafauder une tactique, afin d’en sortir en remportant la victoire. Mais à quel prix ?
Avant d’être un manga, « All you Need is Kill » est un roman à succès japonais. Publié en 2004 dans le magazine pour adolescents Super Dash Bunko, il est l’œuvre de Hiroshi Sakurazaka : un écrivain de science-fiction prometteur. Un an auparavant, il publiait, dans la même revue, son premier roman : « Modern Magic Made Simple ». En découle une série comportant déjà sept volumes, et même une adaptation en manga en 2008 et en animation en 2009. Avec « All you Need is Kill », le scénario se répète presque à l’identique, puisque ce roman d’anticipation est maintenant disponible en manga, mais également dans une version film réalisée par une équipe américaine. Et ce pour une sortie mondiale quasi simultanée.
Le film « Edge of Tomorrow », sorti le 4 juin 2014, est une adaptation extrêmement libre de l’œuvre de Sakarazaka. La boucle temporelle est bien présente, mais le déroulement des opérations est totalement différent. Les personnages n’ont pas exactement le même rôle et ils n’ont surtout absolument pas le même charisme. Comme souvent dans les films américains, la guerre est montrée sous un jour plutôt pragmatique. Certains soldats se font bien tuer, mais comme ils reviennent le lendemain, ce n’est finalement pas si grave. Les deux héros principaux ne sont pas de jeunes recrues d’une vingtaine d’années (1). Et même si Tom Cruise est parfaitement crédible dans son personnage, il n’est pas un soldat déterminé, tout comme Rita incarnée par Emily Blunt est aux antipodes de la jeune femme extrêmement humaine et élevée au rang de guerrière impassible que Sakurazaka décrivait à l’origine.
Afin de compléter la panoplie marketing accompagnant la sortie de ce blockbuster sur les écrans mondiaux, les Japonais ont décidé de faire réaliser leur propre adaptation, bien plus fidèle au roman et, cette fois-ci, sous la forme d’un manga. Et là, pas question de faire appel à d’illustres inconnus. Le design des personnages est du a Yoshitoshi Abe, un professionnel qui s’est fait remarquer grâce à la série d’animation « Serial Experiments Lain », en 1998 (2). C’est d’ailleurs lui qui a eu la chargew d’illustrer le roman original. Le découpage préliminaire du roman sous forme de story-board, les fameux Nemus évoqués dans « Bakuman », est dû à Ryōsuke Takeuchi (3). Et le dessin final est, bien sûr, l’œuvre du talentueux dessinateur du même « Bakuman » : Takeshi Obata. Dans sa version en manga, on retrouve le côté réaliste de l’histoire. Dés le départ, le héros meurt au combat. Ici, pas de chichi scénaristique pour valoriser ce qui n’est en fait qu’un simple soldat. Lorsque Keiji imagine avoir rêvé sa mort, Obata sait parfaitement exprimer le côté humain et angoissé de ce soldat grâce à un dessin réaliste et un trait percutant. Les tensions, les doutes et les interrogations sont tous superbement rendus. Ce dessinateur a un talent fou pour mettre en image n’importe quel type d’aventure : un très bon choix de la part de Shūeisha, l’éditeur japonais !
Si le roman, également publié par Kazé, est prenant, le manga l’est tout autant. Quant au film, c’est une simple curiosité plutôt bien réalisée, mais pleine de guimauve dont on se serait bien passé. Comme le dit si justement l’accroche de cette œuvre : « VIVRE… MOURIR… RECOMMENCER… » À vous de faire de même en appréciant, tour à tour, les trois déclinaisons de cette histoire.
Gwenaël JACQUET
«All you Need is Kill» T1 & 2 par Takeshi Obata
Éditions Kazé manga (6.99€) — ISBN : T1 – 2820317197 – T2 - 2820317200
(1) : Tom Cruise ayant dans la réalité 52 ans et Emily Blunt 31 ans.
(2) : « Serial Experiments Lain » est une série animée réalisée par Ryutaro Nakamura. Diffusée du 6 juillet 1998 au 28 septembre 1998 sur TV Tōkyō, elle comporte 13 épisodes. C’est le premier travail professionnel de Abe en tant que character designer. Il a, depuis, participé à « NieA_7 », « Ailes Grises », « Texhnolyze », « Bienvenue dans la NHK » et « Despera ». En tant que mangaka, il est connu en France pour son titre « Lucika Lucika » paru chez l’éditeur Ki-oon.
(3) : Scénariste publié en France depuis avril 2014, chez Panini manga avec le titre « ST&RS » (STARS)