À peine étions-nous remis de sa cruelle – et non moins excellente – « Cuisine des ogres » que Fabien Vehlmann, scénariste toujours bien inspiré (1), nous assène un nouvel album de plus de 100 pages : une fresque sauvage, poétique et captivante, remarquablement mise en images et en couleurs par l’artiste barcelonais Roger Ibáñez Ugena, qui signe simplement Roger et qui est surtout connu pour sa série « Jazz Maynard ». Cette fois-ci, l’histoire, aussi philosophique que dense et profonde, est pleine de sang, de bruit et de fureur…
Lire la suite...« Violette Nozière vilaine chérie » par Camille Benyamina et Eddy Simon
Voici encore une biographie en bandes dessinées joliment mise en images par un nouveau talent féminin, au trait sensuel et doux, qui alterne habilement les contrastes, entre obscurité et lumières : Camille Benyamina, diplômée de l’école Émile Cohl à Lyon dont c’est la première — et certainement pas la dernière — incursion en ce domaine.
Ce portrait psychologique de cette tristement célèbre criminelle – l’une des affaires judiciaires les plus notoires du Paris de l’entre-deux-guerres – est également fort bien découpé par le scénariste Eddy Simon : journaliste, écrivain et spécialiste du 9e art qui s’est plus intéressé à la personnalité manipulatrice de cette parricide qu’au déroulement, point par point, du fait divers scandaleux. C’est d’ailleurs l’un des principaux attraits de ce bel album pourtant très bien documenté : car tout est dans les jeux de regards et dans l’ambivalence des différents protagonistes.
Ceux qui connaissent déjà toute l’affaire grâce au très bon film de Claude Chabrol, où explosa alors tout le talent de l’actrice Isabelle Huppert qui interprétait ce rôle de monstre en jupons des années trente, apprécieront les partis pris de profondeur graphique et de narration théâtrale. Les autres se laisseront porter, quant à eux, par l’histoire mystérieuse et attachante de cette jeune et perfide menteuse de dix-neuf ans, condamnée à mort pour avoir tenté d’assassiner, avec force de somnifères et de gaz, sa mère et son père qui, lui, ne s’en sortira pas… Finalement graciée, puis réhabilitée, elle mourut d’un cancer des os à l’âge de cinquante et un ans, après avoir déchaîné l’inspiration des surréalistes et de la presse à scandale.
Gilles RATIER
« Violette Nozière vilaine chérie » par Camille Benyamina et Eddy Simon
Éditions Casterman (20 €) – ISBN : 978-203-03854-7