Par les temps qui courent, il est rare qu’un éditeur se lance dans une saga aux allures classiques prévue en plusieurs volumes. Pourtant, Futuropolis a déjà financé les scénarii des six ouvrages nécessaires à l’épopée de « L’Ange corse », lesquels sont d’ores et déjà écrits, et les trois premiers opus sortiront en l’espace d’une seule année… Rien que pour cela — mais pas que… —, saluons la parution du premier tome de « L’Ange corse » : l’histoire d’un orphelin corse qui doit s’expatrier dans l’Indochine des années 1930, pour échapper à une vendetta. Le jeune insulaire est recueilli, à Saigon, par un riche commerçant et propriétaire terrien natif d’Ajaccio : mais sous sa façade respectable, cet homme, bien installé, trempe dans le proxénétisme et le trafic de stupéfiants…
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Bel hommage et bonne idée que cette mise en cases de la vie « historique » de l’auteur italien Hugo Pratt : son compatriote Paolo Cossi (déjà remarqué avec l’émouvant « Medz Yeghern, le grand mal », chez Dargaud) s’étant basé sur des documents d’époque (photos, revues, lettres?) et sur les ouvrages où le maître vénitien avait déjà livré nombre d’anecdotes, entre réalité et fantasmes?, pour en faire un véritable roman d’aventures.
Á la lecture de ce premier tome de deux cents pages (il y en aura trois autres à paraître d’ici la fin 2011), il semble que l’exercice, pourtant plutôt casse-gueule, soit réussi !
Tout commence en Éthiopie (pays alors bouleversé par la guerre coloniale), dans la région de Gaia Zeret-Lalomedir, le 30 mars 1939 : nous allons découvrir un jeune Hugo Pratt préférant conter fleurette aux belles indigènes plutôt que d’assister aux cours dispensés par les militaires italiens. Et quand son père apprend que son fils fait l’école buissonnière « pour filer avec les sauvages », il lui interdit de fréquenter ses amies autochtones. Sans négliger de ridiculiser, une dernière fois, l’instructeur fasciste qui l’a dénoncé, il part, seul, dans le dangereux désert avoisinant : il ne devra la vie qu’à un groupe de chameliers impliqués dans la contrebande de qat… Voilà l’une des nombreuses anecdotes que l’on trouve dans ce premier tome qui s’achève avec son départ d’Afrique pour Venise et ses premiers pas dans le 9e art !
Très bien documenté, mais aussi légèrement romancé de façon onirique (un peu à la manière du « Gainsbourg, vie héroïque » de Joann Sfar), ce biopic en bandes dessinées a le grand mérite de mettre en avant les sources d’inspirations qui ont permis de créer « Corto Maltese » et « Les Scorpions du désert », sans que Paolo Cossi ne cherche à imiter le graphisme de ce grand fabulateur de génie qu’était Hugo Pratt !
Gilles RATIER
? Hugo Pratt, un gentilhomme de fortune tome 1 : Visions africaines ? par Paolo Cossi
Éditions Vertige Graphic (22 Euros)