Les amateurs de son œuvre le savent bien : Jacques Tardi est un boulimique de travail qui dessine matin, midi et soir. Or, « Dessins matin, midi et soir », c’est le titre d’un beau petit recueil édité par Oblique Art (structure dirigée par Pierre-Marie Jamet) qui nous propose pas moins de 160 pages rassemblant des illustrations réalisées par le créateur d’« Adèle Blanc-Sec », sélectionnées dans les nombreux carnets qu’il a noircis (voire mis en couleurs) tout au long de sa remarquable carrière d’auteur du 9e art : croquis, études de personnages… et même courtes bandes dessinées iconoclastes inédites.
Lire la suite...« Mokke » T1 par Takatoshi Kamakura
En Occident, les vampires sont revenus à la mode depuis quelques années. Les Yôkai , pour leur part, n’ont jamais disparu du paysage japonais. Cette culture porte une attention toute particulière à tous ces êtres invisibles et parfois maléfiques qui envahissent le quotidien. À tel point que tous les lieux et tous les objets sont susceptibles d’en accueillir. Le monde du manga s’est régulièrement fait écho de ces phénomènes. Au détour de nombreuses histoires, il est courant de retrouver des Yôkai aussi bien inoffensifs que maléfiques. Pour nous, occidentaux, il est extrêmement difficile de comprendre ce phénomène. C’est pourquoi « Mokke » devrait aussi bien ravir les amateurs de monstres et autres histoires paranormales que les spécialistes du Japon.
Si ce manga en neuf volumes sort aujourd’hui chez nous, c’est sûrement dû au succès de son adaptation en série TV. 24 épisodes ont été réalisés par Madhouse, en collaboration avec Tezuka Productions en 2007. C’est un beau succès pour Takatoshi Kamakura, car « Mokke » est sa première série professionnelle. Malheureusement, les DVD ne sont toujours pas disponibles en français.
Mizuki et Shizuru, deux jeunes filles ordinaires en apparence, vivent chez leur grand-père à la campagne. Exorciste de profession, il aidera régulièrement ses deux petites filles qui ont chacune un don peu banal. Mizuki, la plus jeune, attire les Yôkai, alors que Shizuru possède la faculté de les voir. Dès les premières pages, nous plongeons au cÅ“ur du sujet, sans vraiment plus d’explications. Mizuki, après être allée faire une prière au temple niché en plein cÅ“ur de la forêt, entend ces quelques mots « Porte moiiiii…sur ton dooooos ». Là -dessus, on comprend qu’un esprit vient de se poser sur elle. Sauf que celui-ci pèse extrêmement lourd et que personne ne peut le voir, pas même Mizuki. Sa sÅ“ur Shizuru est appelée à la rescousse et découvre Mizuki possédée par une créature venue des contes anciens. Celle-ci faisant presque la taille et le poids de Mizuki, la pauvre enfant est obligée de rester assise, éreintée par la surcharge.
Chaque chapitre est prétexte à découvrir un nouveau Yôkai. Même si vous n’y connaissez rien, pas de panique ! Des explications hors-texte vous sont fournies, quand celles-ci ne sont pas directement données par l’histoire elle-même. Souvent, c’est le grand-père, fin connaisseur des Yôkai, qui raconte lui-même l’origine de celui dont il est question dans le chapitre concerné. Avec des situations récurrentes de chapitre en chapitre, passant par la découverte d’un Yôkai puis de son exorcisme, on pourrait penser que l’ensemble devienne vite rébarbatif. Il n’en est rien : la répétition n’est pas flagrante et les situations sont assez différentes pour renouveler l’attrait du lecteur. Graphiquement, les Yôkai sont peu représentés. C’est surtout au travers de la vision de Shizuru que nous sommes amenés à les découvrir. Ils n’ont rien de réellement effrayant, même s’ils restent des monstres difformes. Le travail graphique et scénaristique à ce niveau-là est excellent. Il est amusant de voir la réaction des protagonistes, sachant qu’à part les deux sÅ“urs, personne ne peut voir ou sentir les Yôkai. Néanmoins, comme ils font partie intégrante de ce monde, ils influencent le caractère et l’humeur de tout un chacun. Cet aspect est bien mis en avant et joue un rôle primordial dans l’histoire.
Loin des séries monstrueuses où la peur est le leitmotiv, « Mokke » reste un manga attrayant et plutôt destiné à un jeune public intéressé par le surnaturel et les histoires fantastiques sans artifices saugrenus. Elle a l’avantage de présenter les Yôkai d’une manière atypique et didactique. Un petit lexique de ces êtres surnaturels rencontrés au fil des histoires aurait été un vrai plus. Mais les lecteurs les plus curieux pourront également se procurer l’excellent et exhaustif « Dictionnaire des Yôkai » de Shigeru Mizuki, également publié aux éditions Pika.
Gwenaël JACQUET
« Mokke » T1 par Takatoshi Kamakura
Éditions Pika (6,95€) – ISBN : 9782811611170
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