PLUS DE LECTURES D’ETE

Une petite sélection estivale, histoire de patienter en attendant la rentrée? : ? Awrah T.1 : La Rose des sables ? par Ana Luiza Koehler, Christian Simon et Fuat Erkol, ? Oh les filles ! : Deuxième partie ? par Emmanuel Lepage et Sophie Michel, et ? El Niño T.7 : Les Passes de l’Hindou Kouch ? par Boro Pavlovic et Christian Perrissin.

- ? Awrah T.1 : La Rose des sables ? par Ana Luiza Koehler, Christian Simon et Fuat Erkol – Éditions Daniel Maghen (14 Euros)

Ce conte oriental, proposé dans un bel ouvrage édité par le galeriste Daniel Maghen, consiste certainement en la révélation graphique du moment : une architecte de formation, originaire du Brésil, qui n’avait, jusque-là, posté ses dessins naturalistes que sur le site des éditions Dargaud. Repérée par les scénaristes Christian Simon et Fuat Erkol (« La Marque du démon » chez Albin Michel avec Franco Pilotta et « Lenny Valentino » chez Bamboo avec Guillaume Poux), ces derniers lui proposent un projet qui abouti finalement chez Maghen : un récit empreint de l’atmosphère des « Mille et une nuits » et qui nous montre un Bagdad inconnu : une ville qui avait, alors, plusieurs longueurs d’avance culturelles sur l’Europe, alors enlisée dans le Moyen-Âge. Le graphisme aussi classique que sensible d’Ana Luiza Koehler, allié à l’adéquate mise en couleurs de Guy Servais (alias Raives) sur les matières et les formes, met parfaitement en valeur l’histoire de ce jeune orphelin obligé de voler pour survivre. Rattrapé par ses victimes, il n’échappe à l’amputation de sa main (sort réservé aux malandrins et voleurs) que grâce à l’arrivée de l’homme le plus respecté de la cité, lequel le prend alors sous sa protection. Mais ses rapports avec les enfants de celui qui ce considère désormais comme son père adoptif deviennent très difficiles… Des personnages attachants, partagés entre des sentiments contrariés et des combats entre la passion et la raison, une reconstitution historique exemplaire, un érotisme omniprésent…, et une perle rare aux pinceaux dont le trait dynamique et délicieusement rétro nous rappelle certaines bandes dessinées des années 50 !

- ? Oh les filles ! : Deuxième partie ? par Emmanuel Lepage et Sophie Michel – Éditions Futuropolis (15 Euros)

Suite des destinées de trois jeunes filles, cette deuxième partie, qui clôt ce lumineux récit, nous conte leurs problèmes d’adolescentes tourmentées, entre 12 et 18 ans, toujours sous la forme de tranches vies qui s’entrecroisent. Ces fillettes fragiles, d’origine et de milieux bien différents, et que nous avons découvertes dans le premier tome, ont bien grandi ; aujourd’hui, chacune d’elles se cherche socialement et va s’éveiller à l’amour : les aléas de la vie vont-ils alors détruire leur amitié qui semblait indéfectible ? Adoptant une construction des planches en petites cases, tout en réduisant le décor à une forme symbolique afin de ne représenter que le strict nécessaire, Emmanuel Lepage, suite à une méchante souffrance (due à un nerf irriguant l’épaule à la main), a dû changer totalement de technique d’illustration : l’encrage lui procurant une douleur insupportable. Se résolvant donc à délaisser les images plus spectaculaires de ses splendides « Muchacho », « Névé » ou « La Terre sans mal », il pousse ici son crayonné au maximum, laissant la couleur faire le travail ultime pour permettre une lisibilité irréprochable. Son dessin n’en demeure pas moins époustouflant et se révèle parfait pour mettre en lumière ces pudiques portraits vraiment originaux et touchants. Quant à la scénariste (dont c’est le « vrai » premier travail en bandes dessinées), elle semble avoir encore mis plus d’elle-même dans cette deuxième partie : sa narration s’appuyant de plus en plus sur des dialogues judicieusement choisis et se libérant des stéréotypes caricaturaux et manichéens un peu trop présents dans le premier opus.

- ? El Niño T.7 : Les Passes de l’Hindou Kouch ? par Boro Pavlovic et Christian Perrissin- Éditions Les Humanoïdes associés (12,90 Euros)

Voici la fin du deuxième cycle de ce passionnant récit d’aventures situé après la chute du régime taliban et qui nous dépayse totalement en nous emmenant dans les montagnes d’Afghanistan ; là où Véra, ancienne infirmière de la Croix Rouge, va être obligée de fuir Jalalabad, en compagnie d’un ami photographe. En effet, même si elle a retrouvé son âme humanitaire en travaillant désormais pour une ONG, la situation est devenue très inconfortable depuis qu’elle a rencontré un chef de guerre moudjahidin, ex-soldat russe et général de Massoud, et qu’elle a été le témoin impuissant du lynchage de son chauffeur… Par soucis d’exigence, les auteurs (le Croate Boro Pavlovic au dessin et le Breton Christian Perrissin au scénario, lequel se révèle également un étonnant graphiste dans l’ouvrage qu’il vient de publier chez Futuropolis : « La Colline aux mille croix ») ont pris le risque de changer leur fusil d’épaule sur le plan de la narration, et ceci depuis le précédent album. Ils s’éloignent ainsi des traditionnels romans d’aventures pour explorer, plus en profondeur, les soubresauts de l’Histoire contemporaine, quitte à dérouter les lecteurs classiques peu ouverts au changement. Pourtant, le résultat est à la hauteur de nos attentes : le formidable travail de documentation et d’investigation réalisé par le scénariste étant parfaitement mis en images par un étonnant trait aussi fin que réaliste.

Gilles RATIER

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