PLUS DE LECTURES DE BD DU 20 AVRIL 2009

Notre sélection de la semaine : ? Le Chant du pluvier? par Erwan Surcouf, Amandine Laprun et Joseph Béhé, ? Neuf mois ? par Nicolas Vadot, et ? Ken Games T.1 : Pierre ? par Marcial Toledano et Jose Robledo.

? Le Chant du pluvier? par Erwan Surcouf, Amandine Laprun et Joseph Béhé – Editions Delcourt (19,90 Euros)

N’ayons pas peur des mots, cette émouvante histoire publiée dans la collection « Mirages » des éditions Delcourt est certainement l’un des albums les plus intéressants de ces quatre premiers mois de l’année 2009 : grâce à un dessin économe, mais suffisant car sa simplicité est en adéquation avec l’atmosphère du récit, et un scénario touchant, basé sur la psychologie des personnages et leurs paradoxes ; l’ensemble jouant sur une bichromie qui permet une fluidité exemplaire à une narration aussi documentée qu’efficace et pertinente, laquelle se paye même le luxe d’être rythmé par de courtes et étranges scènes chamaniques installant, à leur manière, une vraie ambiance. Le trio responsable de ce petit bijou « bédéesque » avait déjà fait la preuve de sa sensibilité humaniste et artistique, ainsi que de sa finesse à évoquer les relations intrafamiliales, dans « Erminio le milanais », leur précédente collaboration, également très réussie ; mais là, l’évolution, dans la composition et la subtilité, est manifeste… A l’invitation de son fils, qu’il n’a, jusqu’alors, jamais bien compris, un vieux paysan béarnais, récemment veuf, accepte de partir pendant quelques semaines pour le Groenland, pays glacial où son rejeton est en train de terminer sa thèse de climatologie. Malgré les protestations véhémentes de sa fille qui, elle, était restée auprès de ses parents pour les soutenir dans les durs moments, le vieux Bernat va donc s’expatrier de ses sacro-saintes montagnes béarnaises. Et dans ce contexte très particulier où la nuit est permanente, contre toute attente, la glace va se briser (dans tous les sens du terme)…

? Neuf mois ? par Nicolas Vadot – Editions Casterman (15 Euros)

« Neuf mois » ou comment un album de bande dessinée peut devenir un exutoire méritoire : c’est-à-dire un moyen de se débarrasser, ou du moins de transposer, ses doutes et ses peurs dans un récit onirique qui mérite vraiment toute votre attention ! Le héros de cette histoire très originale roule de nuit, au volant de sa Coccinelle, sous une pluie automnale, au hasard des routes de la petite ceinture bruxelloise. Ceci pour tenter de calmer ses insomnies dues aux soucis qu’il se fait pour sa femme, enceinte de leur premier bébé et qui n’en est plus qu’à quelques semaines de l’accouchement. En passant dans l’un des tunnels qui serpentent sous la ville, il se retrouve subitement dans un autre monde : en plein jour, au centre d’un désert blanc, conduisant non plus une Coccinelle, mais une Chevrolet Chevelle 1968… Et dire que, comme le précise l’auteur dès la deuxième page de cette curieuse thérapie se déroulant dans un univers déroutant dont le ciel est parcouru par d’énormes requins et dont les habitants semblent être tous des clones de Sigmund Freud : « Dans la vie, parfois, on s’angoisse pour un rien… »… Après ses fructueuses collaborations avec le scénariste Olivier Guéret (« Norbert l’imaginaire », excellente trilogie sur un peuple parallèle vivant dans notre cerveau pour tenter d’expliquer notre fonctionnement amoureux, et « 80 jours », histoire fantastique et sensible reposant sur l’étrange relation qui se noue entre un vieil homme malade et une jeune et belle femme qui est un peu son infirmière à domicile), Nicolas Vadot joue momentanément cavalier seul : mettant son imagination en roue libre, multipliant les dialogues savoureux et peaufinant son dessin brut et charbonneux de moins en moins caricatural ; alors, qu’à l’origine, ce talentueux illustrateur qui vit désormais à Canberra (en Australie) s’était spécialisé dans le dessin d’actualités et d’humour.

? Ken Games T.1 : Pierre ? par Marcial Toledano et Jose Robledo – Editions Dargaud (13,50 Euros)

La nouvelle vague des auteurs d’origine espagnole est assez étonnante : que ce soient les duos Juanjo Garnido et Juan Diaz Canales (« Blacksad ») ou Roger et Raule (« Jazz Maynard »), le plus intimiste Paco Roca (« Rides ») ou les graphistes Rubén (« Jolin la teigne ») et José-Luis Munuera (« Nävis »). C’est ce dernier secondé par son scénariste favori (Jean-David Morvan) qui a poussé ce nouveau tandem (composé de Marcial Toledano au dessin et de Jose Robledo au scénario, mais ce dernier dessine aussi) vers la maison Dargaud. Et il a bien fait, car ce premier opus basé sur l’idée subtile de petits mensonges entre amis est assez étonnant, autant du point de vue scénaristique (qui se situe entre les chefs-d’œuvre hollywoodiens des années soixante et les comics à la Neil Gaiman) que graphique (un style réaliste franco-belge maîtrisé mais mâtiné de mangas). Les trois principaux personnages de ce triptyque qui s’annonce passionnant vont exprimer successivement leur point de vue et on commence par Pierre, étudiant en mathématique (c’est du moins ce qu’il continue à faire croire à tout le monde), dont le seul avenir réside désormais dans la boxe. Il revoit TJ, un copain de fac devenu, soi-disant, un cador de la finance (mais en fait, c’est un champion au poker qui hante les tables de jeux), lequel lui présente Anne, la femme de sa vie : une institutrice. Seulement voilà, quand Pierre la recroise dans un café, il s’aperçoit qu’elle y est serveuse… Tout le monde ment donc à tout le monde, et les conséquences sont telles qu’on risque de ne plus croire personne…

Gilles RATIER

La Bande Annonce de « Ken Games » :

Galerie

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