COMIC BOOK HEBDO n°70 (18/04/2009)

Cette semaine : le JOKER revient, et il n’est pas content du tout du tout du tout !

JOKER (Panini Comics, DC Icons)

Ahhhh… le Joker… Comment continuer à inventer ce personnage si historique et récurrent qu’il a déjà de loin dépassé les stades du galvaudage, du génie, du ridicule et du flamboyant, pourrissant la vie de Batman depuis des décennies et toujours aussi dingue… Toujours aussi dingue ? Voilà peut-être un élément intéressant afin de comprendre cet album et ceux qui se créeront dans le futur… Car on pourrait avoir fait le tour du Joker depuis longtemps si cette propension infinie à délirer sans fin sans qu’aucun scénariste, aucune logique éditoriale ne semblant pouvoir l’endiguer, n’était pas aussi puissante, si hypnotique… Pour peu qu’un auteur inspiré et talentueux se donne la peine de revisiter le mythe, et c’est reparti pour un tour ! Chouette ! C’est le cas ici avec l’inspiré et talentueux Brian Azzarello, dont le scénario direct et subtil est magnifié par les dessins impressionnants de Lee Bermejo (dont je vous parlais récemment sur un autre titre batmanien : Batman/Deathblow). Grâce à la géniale série 100 Bullets, vous connaissez le goût d’Azzarello pour les histoires noires à lourds relents policiers, son sens parfaitement huilé de la narration et de la mise en scène, sa manière inimitable d’amener un récit à son terme sans le fermer pour autant. Eh bien vous ne serez pas déçus par cet album qui réunit toutes les qualités de l’auteur, sans parler du talent de Bermejo pour les images fortes et noires, nous plongeant sans ambiguïté dans des atmosphères sulfureuses à souhait. Aidé par Mick Gray à l’encrage et bénéficiant des très belles couleurs de Patricia Mulvihill, ce dessinateur nous propose une version du Joker et de son univers qui laisse une impression glaciale par un certain réalisme fantasmé. En voyant la manière dont il a dessiné le Joker, on ne peut s’empêcher de penser à l’acteur Heath Ledger qui incarna ce personnage avec génie dans le film The Dark Knight de Christopher Nolan, exploitant un côté très concret de ce physique ô combien particulier, lèvres fendues en avant. L’effroi qui en découle ne peut que servir à merveille toute la complexité morbide de ce vilain qui tient ici le haut de l’affiche avec un panache écœurant.
Car le Joker est revenu. Oui. Je vous dis que oui. Libéré de l’asile d’Arkham. En plein jour. Légalement. Sale temps. Revenu à la « vie civile », le Joker s’aperçoit que les choses ont changé pendant son absence, à Gotham City. Là où jadis il régnait et commandait à ses sbires, se faisant maître des territoires intéressants à conquérir, fructifiant ses acquis par sa mainmise sur les gangs en place, il n’est désormais plus rien qu’une ancienne terreur. L’argent, les biens, le mobilier et l’immobilier, les contacts : tout a continué sans lui, et son règne n’est plus qu’un souvenir pour les petits rois qui ont pris le pouvoir. Alors il faut réagir. Et vite. Et fort. Dans sa quête abrupte pour reconquérir son autorité, le Joker est accompagné d’une de ces petites frappes si prévisibles, si faites pour ne rester que des petites frappes malgré leur appétit de monter dans l’échelle du crime. Un outil idéal pour le Joker, et il ne va pas se gêner. Il va même trouver en Jonny Frost (oui, c’est son nom, sans h) un allié de « poids » par son inconséquence et ses rêves de gloire malsaine. Et c’est même ce qui plaît autant au Joker : il va trouver en Frost l’occasion rêvée d’exprimer tout son vice et sa perversion, se jouant de lui comme un chat avec une souris. Cet album nous raconte donc comment le Joker revient sur le devant de la scène, conscient d’éveiller automatiquement la colère de son ancien et historique ennemi : Batman, bien sûr. Mais le justicier névrosé et habillé en chauve-souris n’apparaîtra que le moment opportun, de manière absolue et elliptique, selon le bon vouloir d’Azzarello qui une nouvelle fois touche à la perfection dans le rythme et le dénouement. Même ceux qui ne sont pas des fans de l’univers DC ne peuvent que prendre terriblement goût à ce genre d’embardée artistique. Un très bon album, vous l’aurez compris…

Cecil McKINLEY

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