On vous a déjà dit tout le bien que l’on pensait de la saga ébouriffante, délirante et jubilatoire « The Kong Crew » d’Éric Hérenguel… (1) Or, voilà que les éditions Caurette sortent une très belle intégrale de luxe de la trilogie (224 pages, dans sa version originale en noir et blanc grisé et en français) : une incroyable épopée hommage aux comics, aux pulps et aux vieux films fantastiques des fifties ! Ceci alors que le tome 3, cartonné et en couleurs, vient aussi à peine de paraître chez Ankama… La totale en noir et blanc ou les trois volumes en couleurs, vous avez donc le choix ! L’essentiel étant de ne pas passer à côté de ces aventures follement drôles, débridées et imaginatives, sous couvert de fable épique et écologique !
Lire la suite...« Les Enfants de la mer » T1 par Daisuke Igarashi
Daisuke Igarashi a déjà enchanté le public francophone avec des titres singuliers, mais pleins de poésie, comme « Hanashippanashi – Patati patata », « Sorcières » et « Petite forêt » aux éditions Casterman. Aujourd’hui, c’est chez Sarbacane que l’on va trouver sa série « Les Enfants de la mer ». Au japon, un cinquième et vraisemblablement dernier tome est prévu dans l’année, ce qui en fait actuellement la plus longue série d’Igarachi. Ce manga venant rejoindre « Le Chien gardien d’étoiles » de Takashi Murakami qui était déjà au catalogue de cet éditeur.
Ruka est une collégienne tonique et vive. Ses vacances d’été commencent bien mal. Elle se fait exclure du club de Handball après des accusations de violence envers l’une de ses camarades. De toute façon, elle n’était pas très fair-play ! Dépitée, elle décide de se rendre à Tokyo pour voir la mer. Pour une enfant, se repérer seule dans la grande ville n’est pas si simple que ça. La nuit finit par arriver alors que Ruka arrive face a la mer. Là, elle fait la rencontre d’un étrange garçon du nom de Umi, ce qui signifie « Mer » en japonais. Il nage comme un dauphin et sa peau brille comme les écailles des poissons. Ou plutôt comme le fantôme que Ruka a un jour aperçu à l’aquarium géant où travaille son père. Umi a un frére, Sora : « le Ciel ». Il séjourne dans la chambre fermée d’un hôpital. Il ne supporte pas le soleil et ne se sent bien que dans l’eau. Pourtant, Umi et Sora ressemblent à tous les enfants même si, eux , ont un caractère et un physique diamétralement opposé. La science est incapable d’expliquer pourquoi ils se dessèchent hors de l’eau et comment ils respirent au plus profond des océans. Bien sûr, ces deux garçons sont assez solitaires. Ils ne se mélangent pas avec les autres humains. Cependant, Umi trouve que Ruka leur ressemble. Elle sent la même odeur qu’eux et voie les mêmes poissons étoilés. Une longue histoire d’amitié, sur fond de mystère, vient de naître.
Cette histoire, même si elle est accessible aux enfants, a un ton très adulte par certains points. La comparaison avec des mangas existants est inévitable. Les premiers chapitres auraient le calme et la contemplation du monde environnant aperçu dans « L’Homme qui marche » de Jiro Taniguchi. La passion de la mer et de ses mystères propres à « Retour vers la mer » du regretté Satoshi Kon nous revient immédiatement en tête. Ou encore, les œuvres de Hayaho Myazaki, empreinte de poésie et de respect de la nature. Pourtant, « Les Enfants de la mer », mélange de mélancolie et de suspens, est unique. Le scénario est construit de telle manière qu’il se passe toujours quelque chose. L’histoire avance rapidement même si de nombreux passages sont contemplatifs. Pourtant, on aimerait que tout arrive plus vite tellement l’intrigue est intéressante. Qui sont ces enfants, pourquoi et comment ont-ils pu être élevés au fond des mers par des mammifères marins?? Combien sont-ils dans le monde ? Qu’est-ce qui les relie à Ruka, jeune fille a priori ordinaire ? Pourquoi des centaines de poissons disparaissent des aquariums à travers le monde ? … Une fois ce premier volume refermé, ces questions reviendront inlassablement en tête. L’auteur construit brique par brique un univers féerique, mais néanmoins parfaitement crédible. Les fonds marins, encore inexplorés sont sujets à fantasme et peuvent être le théâtre de découvertes surprenantes.
Le trait de Daisuke Igarachi risque de ne pas faire l’unanimité au sein des lecteurs de mangas. Fin et jeté, il semble sortir spontanément de la plume de l’auteur. Les ombres sont composées des traditionnelles trames, mais également de hachures, notamment dans les décors. Et ce, sans alourdir le dessin, chaque case reste parfaitement claire.
La composition des planches alternant vue d’ensemble et gros plans permet de focaliser son attention sur l’essentiel ou de se perdre dans ses décors immenses. Rien n’est construit au hasard, malgré un trait saccadé, on sent que chaque détail est placé là sciemment. Tout ce qui fait partie de notre quotidien est parfaitement documenté et représenté avec grand soin. Du coup, lorsque l’action plonge dans leurréalistem on se surprend à trouver cela ptout à fait normal
J’aime particulièrement les attitudes graphiques des différents protagonistes. Leurs regards sont apaisants et leurs mouvements gracieux, que ce soit sur terre ou dans l’eau. On se laisse facilement embarquer : un vrai plaisir visuel et moral. On attend juste la suite.
Gwenaël JACQUET
« Les Enfants de la mer » T1 par Daisuke Igarashi
Édition Sarbacane – (15 €) ISBN : 978-2-84865-500-0