Dix ans après la parution de « Résurrection », la première partie d’un diptyque accouché dans la douleur, voici enfin « Révélations » : conclusion du dernier récit du regretté Philippe Tome, décédé alors qu’il travaillait sur les dernières pages de son scénario. Les éditions Dupuis proposent, enfin, l’intégralité de cette aventure magistralement dessinée par Dan Verlinden, digne successeur de ses deux prédécesseurs : Luc Warnant et Bruno Gazzotti.
Lire la suite...« The Boys » T12 par Russ Braun et Garth Ennis, et « FreakAngels » T5 par Paul Duffield et Warren Ellis
Décidément, c’est une période bien sombre pour les fans de comics… Après le décès de Jerry Robinson la semaine dernière, c’est aujourd’hui un autre monument des comics qui disparaît: Joe Simon. Je lui dédie bien évidemment cet article… Et puisque the show must go on, je vous parlerai aujourd’hui de deux séries en cours de publication que j’aime beaucoup: « The Boys » et « FreakAngels ».
« The Boys » T12 (« Croire ») par Russ Braun et Garth Ennis
Déjà le 12ème tome de « The Boys » qui continue de sortir à un rythme très soutenu, témoignant du succès obtenu auprès du public français. Tant mieux, car cette série ne baisse pas en qualité ni en intérêt, même si Darick Robertson n’est plus systématiquement sur le titre depuis quelques volumes déjà (et c’est bien dommage !). J’avais très peu apprécié les dessins de John McCrea qui avait emmené la série dans une esthétique assez raide et sommaire… Dans ce volume, c’est Russ Braun qui reprend les rênes, et son style passe beaucoup mieux que celui de McCrea, même si l’on ne peut que regretter l’absence de Robertson. Par contre, ce 12ème tome s’avère tout à fait névralgique et indispensable quant aux fondamentaux de l’histoire, abordant des éléments qui sont en passe de se régler depuis pas mal de temps déjà. On en apprendra plus sur la taupe des P’tits Gars auprès des Sept, sur les véritables intentions du Protecteur afin de s’imposer à Vought et au gouvernement, sur la relation de confiance entre P’tit Hughie et Butcher, sans oublier le dénouement de l’histoire d’amour à tiroirs de P’tit Hughie et d’Annie January/Stella. Et comme d’habitude avec Ennis, ça cartonne dur, entre humour, provocation et désarroi…
Après l’Hérogasme, cette orgie de tous les excès organisée pour satisfaire les plus bas instincts des super-héros, voici donc venu le temps de « Croire », évènement religieux censé faire passer les super-héros pour de véritables divinités auprès de la population. C’est cynique et dégueulasse à souhait, Ennis en profitant pour régler quelques comptes avec l’hypocrisie meurtrière de ceux qui utilisent la foi pour arriver à leurs fins de pouvoir et de manipulation. Décidément, les Sept ont la peau dure et ne semblent pas du tout prêts à abdiquer malgré les bâtons que les P’tits Gars leur mettent dans les roues (vous savez comme moi qu’ils préfèreraient leur mettre le bâton autre part, mais restons calmes et posés). Malgré un kaléidoscope d’évènements importants se mettant en place pour la suite de l’histoire, c’est bien la relation entre P’tit Hughie et Stella qui est le point d’orgue de ce volume, donnant une nouvelle fois l’occasion à Ennis de démontrer qu’il n’est pas qu’un iconoclaste furieux, et qu’il y a bien un p’tit cœur qui bat, dans sa poitrine. P’tit Hughie et Stella sont tombés amoureux et ont entamé une vraie relation en cachant à l’autre qui ils sont réellement ; donc sans savoir qu’ils sont chacun dans le camp adverse de l’autre. À ce petit jeu du « je ne suis pas ce que je te dis être », surtout dans ce contexte d’affrontement des valeurs et vu le passé de chacun, il fallait bien s’attendre à ce que ça pète à un moment… P’tit Hughie découvre qui est vraiment Annie January, et comment elle est rentrée dans l’équipe des Sept, c’est-à-dire par l’humiliation sexuelle… À la fin du volume, tout semble perdu, P’tit Hughie plaque Stella dans la colère et les larmes, mais… leur histoire s’arrêtera-t-elle définitivement pour autant ? On ne l’espère pas, car ce serait un beau gâchis…
« FreakAngels » T5 par Paul Duffield et Warren Ellis
Voici l’avant-dernier volume de « FreakAngels », la série soft adolescente de Warren Ellis. Un volume important en termes de révélations qui nous en apprend toujours plus sur les pouvoirs de notre équipe aussi puissante que désemparée. La découverte de l’étendue réelle de leurs pouvoirs ne va pas se passer dans la joie et l’allégresse, mais bien dans la violence et le danger. C’est un peu la nature générale des relations entre les membres des FreakAngels qui va en être changée, ne pouvant faire l’économie d’une redistribution des cartes et d’un lien qu’ils ne peuvent rompre. Même Mark et Luke doivent être envisagés autrement par le reste du groupe, au grand dam de certains, vu la nature assassine et manipulatrice de ces deux brebis galeuses… Mais il semblerait que ce qui est en train de se révéler oblige chacun à mettre de l’eau dans son vin, et à prendre sur soi pour que les FreakAngels n’implosent pas…
Comme je l’ai déjà dit, « FreakAngels » n’est pas la série la plus forte ni la plus explosive d’Ellis qui nous a habitué à bien plus trash. Mais ne soyons pas trop dupes : « FreakAngels » est beaucoup moins innocent qu’il n’y paraît. On y parle tout de même d’abus de pouvoir, de violence perpétrée à l’insu de l’autre, de sévices sexuels et de manipulation, dans un contexte de fin du monde aussi calme qu’anxiogène. J’attends impatiemment le dernier volume afin de connaître le dénouement de cette histoire touchante où chacun des personnages engendre une véritable empathie avec le lecteur. Et puis je ne cesse d’être émerveillé par les dessins et les couleurs de Paul Duffield, un artiste qui reste pour moi une véritable révélation, l’un des dessinateurs les plus originaux du moment. Il y a toujours ces petites fluctuations dans le dessin, avec parfois des visages un peu patauds, mais dans l’ensemble son trait est toujours aussi incroyablement fin et élégant, et ses couleurs tout aussi subtiles, nous emmenant dans des atmosphères uniques. Ses incrustations de ciel, de mer, de briques, apportent vraiment quelque chose dans son travail de composition, bâtissant un univers esthétique qu’on a rarement vu respirer ainsi. Duffield excelle dans les décors – qu’ils soient intérieurs ou extérieurs – et impose avec raffinement et discrétion un environnement terriblement réaliste par ses ombres et ses lumières, et son sens de l’espace. Après le dernier tome de « FreakAngels », j’espère que nous aurons bientôt droit en France à l’édition des autres travaux de Paul Duffield pour Avatar… Un artiste à suivre et à surveiller de près.
Cecil McKINLEY
« The Boys » T12 (« Croire ») par Russ Braun et Garth Ennis Éditions Panini Comics (11,00€) – ISBN : 978-2-8094-2142-2
« FreakAngels » T5 par Paul Duffield et Warren Ellis Éditions du Lombard (16,00€) – ISBN : 978-2-8036-2856-8