On vous a déjà dit tout le bien que l’on pensait de la saga ébouriffante, délirante et jubilatoire « The Kong Crew » d’Éric Hérenguel… (1) Or, voilà que les éditions Caurette sortent une très belle intégrale de luxe de la trilogie (224 pages, dans sa version originale en noir et blanc grisé et en français) : une incroyable épopée hommage aux comics, aux pulps et aux vieux films fantastiques des fifties ! Ceci alors que le tome 3, cartonné et en couleurs, vient aussi à peine de paraître chez Ankama… La totale en noir et blanc ou les trois volumes en couleurs, vous avez donc le choix ! L’essentiel étant de ne pas passer à côté de ces aventures follement drôles, débridées et imaginatives, sous couvert de fable épique et écologique !
Lire la suite...« Le Berceau des esprits » T1 par Kei Sanbe
L’année dernière, l’éditeur Ki-oon sortait « L’Île de Hôzuki », premier récit d’horreur traduit en français de Kei Sanbe(1). Joli succès pour l’auteur et l’éditeur. Du coup, il récidive avec un nouveau thriller gore « Le Berceau des esprits ». :huis-clos en pleine mer, entouré de zombies et autres joyeusetés cannibales. De quoi faire frissonner les jeunes lecteurs en mal de sensations fortes.
« Le Berceau des esprits » se passe dans un monde sens dessus dessous. Un paquebot de croisière a chaviré en pleine mer, il se retrouve donc, la tête en bas. Les survivants doivent trouver une issue en montant dans la cale. On ne sait pas pourquoi et comment le bateau s’est renversé. Tout ce que l’on sait, c’est qu’il y ,a sur ce navire, un tueur zombi armé d’une hache qui décime les passagers un par un.
Ce récit visant principalement les adolescents, il fallait un prétexte pour ne pas peupler cette croisière que de richissimes retraités. Du coup, on retrouve l’inévitable groupe d’écoliers en sortie scolaire. Les principaux protagonistes sont particulièrement stéréotypés et leur personnalité est tellement évidente au premier coup d’œil qu’il est difficile d’être surpris par la tournure des événements.
Ayukawa est une jeune fille pleurnicheuse et peu sûre d’elle. Elles représentent le fantasme masculin par excellence : jupe courte et situations scabreuses avec tout le fan service qui tourne autour. Dès la première page, c’est elle qui apparaît nue sur la page de garde. Elle se retrouve ensuite dans une position de dominée. Prise de panique, elle se pisse littéralement dessus. Puis quelques chapitres plus loin, en petite tenue, elle plonge pour essayer de trouver un autre passage en nageant. Néanmoins, son air de petite fille fait que l’on a envie qu’elle s’en sorte, ce qui lui vaut d’être toujours protégée par les autres garçons, ses compagnons d’infortune.
En premier, Takigawa, un jeune a l’air égoïste et qui est extrêmement froid et détaché face aux événements. Pourtant, il sait se montrer extrêmement attentif aux autres et se comporte un peu comme un leader, même s’il n’hésite pas à se moquer des faiblesses de ses camarades.
Kasuga est, pour sa part, un grand et beau jeune homme. Soucieux des autres, il fait tout pour être agréable, tout en étant à l’écoute de ses camarades. Il a toujours le mot qu’il faut pour apaiser la situation et rassurer. Ses réactions, que l’on pourrait croire plus mature contrebalance avec l’impulsivité de Takigawa.
Quatrième du groupe, Miya, une autre jeune fille fragile, arrive un peu plus tard. Elle a assisté au massacre de tous ses camarades par un prof zombifié sans lever le petit doigt et s’en sent un peu coupable, mais pas tant que ça.
Au fur et à mesure, d’autres protagonistes viendront se joindre à ce groupe de survivants afin de trouver une sortie et de pouvoir attendre d’hypothétiques secours à l’air libre. Ils entreprennent de passer de pont en pont, afin d’arriver dans la quille du bateau qui se trouve donc hors de la mer.
Ce récit d’horreur, extrêmement contemporain, est bien loin des récits d’épouvante des EC Comics qui abreuvaient la jeunesse américaine dans les années cinquante. Ici rien n’est fait dans la subtilité : ça découpe, ça transperce, ça trucide à tour de bras. Des zombies dévorent des restes humains, des bouts de membres dépassent des décombres, les cadavres bien visibles jonchent le sol, écrasés sous des amas de ferraille leur ayant broyé la tête et le corps. Spectacle peu réjouissant qui pourtant m’a laissé froid. Il est difficile d’avoir de la compassion pour ces personnes que l’on ne connaît pas et l’étalage d’horreur finit par rendre insensible le lecteur. Le récit n’est que voyeurisme, on est loin de la psychologie d’un « Dragon Head »(2) ou de « Survivant »(3). Dans la lignée des blockbusters fantastiques américains, le récit est construit de manière linéaire avec une progression constamment entrecoupée de passages larmoyants ou l’horreur côtoie le gore absolu.
Surfant sur la mode actuelle des films de zombis, « Le Berceau des esprits » est un pur produit de divertissement de notre époque. Simple à comprendre, le lecteur rentre immédiatement dans le vif de l’histoire, Kei Sanbe ne s’embarrasse pas d’explications saugrenues, le but étant d’être déboussolé comme peuvent l’être les passagers de ce paquebot. Dès les premières pages, on découvre le carnage qui est en train de se dérouler : l’action est là, elle se déroule sous nos yeux, il n’y a pas de place pour les sentiments. Ensuite, le dessin renforce le côté gore des scènes : parfaitement détaillées avec juste ce qu’il faut comme effets, Kei Sanbe sait être percutant sans en faire trop. Très différents de « L’Île de Hôzuki » au niveau de la construction scénaristique, on retrouve un côté sombre et oppressant,. Espérons que la fin sera moins tirée par les cheveux.
Amateur de zombis et de jeunes filles en détresse, ce manga est fait pour vous ! Il a tous les ingrédients pour s’évader dans un monde ou l’horreur n’est, heureusement, que fiction…
Gwenaël JACQUET
« Le Berceau des esprits » T1 par Kei Sanbe
Éditions Ki-oon (7,50€) – ISBN : 978-2-35592-305-0
(1) Avant cela, Kei Sanbe avait eu l’honneur de deux autres titres publié en France : « Testarotho » chez Soleil et « Kamiyadori » chez Kurokawa. Déjà violents, mais pas encore dans l’esprit gore comme c’est le cas avec « Le Berceau des esprits ».
(2) « Dragon Head » : manga en 10 tomes de Minetar? Mochizuki. Publié aux éditions Pika en 1997 puis réédité en version plus luxueuse en 2010. Suite à une catastrophe d’une ampleur considérable, un groupe d’écolier se trouve coincé dans un tunnel sombre. L’auteur en profite pour réaliser un thriller psychologique particulièrement réussi, mais dont la fin décevra la plupart des lecteurs.
(3) « Survivant » : manga en 10 tomes de Tako Saito, Paru entre 2007 et 2008 chez Milan éditions, dans la collection « Kankô » (6.95€). Satoru se trouve coupé du monde suite à un tremblement de terre le laissant seul sur une île. Il finit par rejoindre une ville sur le continent, mais ce n’est pour trouver que désolation et misère.