« Projet Anastasis » : la résurrection d’entre les morts !

Premier tome de la série « Ceux qui n’existaient plus », « Projet Anastasis » est porté par un nouveau duo d’auteurs : le dessinateur Olivier Mangin et le scénariste Philippe Pelaez. Pétri de références, ce thriller slave dévoile une à une ses surprises. Comme des poupées russes. La plus petite sera-t-elle la plus sidérante ?

D’emblée, on constate que le dessin est habillé des douces couleurs numériques de Yoann Guillé, lequel a l’intelligence de laisser sa délicate colorisation en retrait du trait noir des contours. Vieux briscard doté d’un trait classique de type ligne claire réaliste, Olivier Mangin sert efficacement le récit d’un captivant scénariste : Philippe Pelaez. Valorisée par un jeu d’ombres binaire, la sobriété de ce trait, exempt de fioriture et de maniérisme, est compensée par un nombre accru de cases, souvent appuyé par de grandes cases de décor en débord. En l’espèce, le prolifique Pelaez aborde le domaine du thriller, genre où celui qui affirme aimer les jeux de piste trouve un idéal terrain de jeu.

Quid du projet Anastasis ? Il s’agit d’une révolutionnaire expérience neurobiologique conduite de nos jours, à Vologda, par le pouvoir russe. Là, dans le centre de neurosciences Matriochka, 20 femmes et hommes participent à cette expérimentation gouvernementale, totalement isolés du monde durant un an — même du monde numérique extérieur —, afin que le professeur Vetrov analyse leurs stimuli. Traumatisée par l’assassinat de sa progéniture et de son mari, une jeune femme, Natacha Karpovna, a accepté d’en être l’un des cobayes, tout comme l’ancien des forces spéciales Yegor. Rapidement, les scientifiques s’interrogent sur les réactions de Natacha, au point de douter de l’efficacité de leur traitement. Amnésique, elle subit en effet un traitement contre Alzheimer préconisé par le redoutable Vetrov. Pire, les scientifiques craignent qu’elle meure à l’éventuelle annonce d’une inconcevable vérité : sa biographie n’est que fictive !

Mais les signes s’accumulent bientôt aux yeux de Natacha : ses coreligionnaires et elle-même sont surveillés pas des caméras, de discrets micros et même des gardes armés… Alors, Natacha découvre le cadavre d’une femme qu’elle pensait avoir quitté le centre, le jour de leur arrivée : celle-ci ayant au dernier moment refusé de participer à l’expérimentation. Plus curieux encore, ce cobaye s’avère avoir une double identité. Elle est morte deux fois, car tous les cobayes sont officiellement morts — traumatisés, amnésiques et socialement condamnés. Y compris Natacha dont la véritable identité est Lena Tsareva… Alors, qui a réellement tué les deux enfants qui hantent ses cauchemars ? Qui sont-ils ? Saint Anastase, priez pour eux…

Bref, tout comme Vetrov manipule ses cobayes humains, Pelaez joue avec son lecteur dans ce thriller palpitant au cœur d’une — fantasmée — Russie contemporaine. Ce premier album a le charme des poupées russes, mais aussi son corollaire : la frustration, une fois qu’on a dévoilé la dernière poupée gigogne, de ne pouvoir en soulever rapidement une autre.

Jean-François MINIAC 

 « Ceux qui n’existaient plus T1 : Projet Anastasis » par Olivier Mangin et Philippe Pelaez
Éditions Grand Angle (15,90 €) EAN : 978-2-8189-8734-6
Parution 1er mars 2023

Galerie

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*

Vous pouvez utiliser ces balises et attributs HTML : <a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <strike> <strong>