Rabaté règle ses comptes avec les apparences et les faux-semblants…

En attendant la sortie de son nouveau film (repoussée en avril à cause de la COVID-19), l’auteur des « Petits Ruisseaux », de l’adaptation d’« Ibicus » ou du diptyque « La Déconfiture », nous a concoctés cette belle histoire d’amour improbable en bande dessinée. Tout en critiquant la société bourgeoise à bout de course des années soixante, il y met en exergue certains germes d’une révolte sous-jacente qui n’allait pas tarder à exploser : d’ailleurs, son titre — « Sous les galets la plage » — n’est autre qu’une référence directe à Mai 68.

Au mois de septembre 1962, trois futurs étudiants de bonne famille prolongent leurs vacances dans une station balnéaire du Finistère, entre littoral désert et résidences secondaires fermées. Débarrassés de l’autorité de leurs parents repartis travailler dans le lieu de leur domicile principal, ils profitent de cette peu fréquente liberté pour descendre quelques bouteilles laissées dans la cave familiale et vivre, si possible, de nouvelles expériences. Un soir, sur la plage, ils rencontrent une jeune et jolie fille plutôt délurée. Finalement piégés par cette donzelle manipulatrice, ils se retrouvent contraints de participer aux cambriolages de certaines maisons de ce port de pêche touristique délaissées en cette saison, en rejoignant la bande d’un débonnaire pied nickelé adepte de la réappropriation des richesses.

L’un des trois bacheliers en quête d’évasion, fils de militaire timide, naïf et élevé à la dure pour devenir un bon gradé, va tomber raide amoureux de cette sauvageonne rejetée par sa mère, car fruit d’un viol collectif, et va s’émanciper en défiant son destin tout tracé et la société…

En délicat scrutateur de l’âme humaine, Pascal Rabaté nous emballe une fois de plus avec ce récit de 134 planches aussi dramatique que léger et poétique, où il tente d’exorciser également quelques-uns de ses propres démons. Et comme à son habitude, sa narration est remarquablement fluide : en effet, dès les premières pages, on est plongé dans une ambiance nostalgique et bien particulière, passant d’une case à une autre avec une facilité étonnante.

Quant à son graphisme tout en élégance — où ce maître du noir, du gris et du noir et blanc, joue avec brio avec les ombres et les lumières —, il est ici rehaussé par de subtiles touches de couleurs pastel, lesquelles conviennent parfaitement au charme de l’histoire, ne polluant, en aucune façon, la force du trait…

Gilles RATIER (1)  Sur Pascal Rabaté, voir aussi sur BDzoom.com : « Alexandrin : l’art de faire des vers à pieds » par Alain Kokor et Pascal Rabaté« C’est aujourd’hui que je vous aime » : les années Giscard vues par François Morel et Pascal Rabaté…« La Déconfiture T1 : Première Partie » par Pascal Rabaté« Le Linge sale » par Sébastien Gnaedig et Pascal RabatéAvec « Fenêtres sur rue » (sortie fin août), Pascal Rabaté jongle avec différents arts : dont le 9e !Pascal Rabaté et Simon Hureau, à propos de « Crève Saucisse »Rabaté met Trenet en BD !

« Sous les galets la plage » par Pascal Rabaté

Éditions Futuropolis (25 €) — EAN : 978-2-81020-111-2

Parution 17 novembre 2021

Galerie

Une réponse à Rabaté règle ses comptes avec les apparences et les faux-semblants…

  1. Barre dit :

    On se laisse vraiment prendre aux ambiances des albums de Rabaté. Lors du feuilletage d’un album de cet auteur, on se dit d’abord que c’est dessiné à la « va vite », que les couleurs sont un peu étranges, puis le charme opère, dû au scénario assez prenant, à l’installation d’une atmosphère particulière, bref au talent de Rabaté ! À voir avec cet album… Personnellement, je reste sous le charme du  » petit rien tout neuf avec un ventre jaune », fallait oser un titre pareil!

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