En 1969, Vaillant le journal de Pif — qui ronronne trop au goût de ses rédacteurs — devient Pif-Gadget. Aux héros classiques, la rédaction, dirigée par Richard Médioni, souhaite ajouter de nouvelles séries comiques. C’est ainsi qu’« Horace, cheval de l’Ouest » voit le jour, aux côtés de « M. le magicien », « Couik » ou « La Jungle en folie ». Plus inspiré par les dessinateurs populaires italiens que par l’école franco-belge, Jean-Claude Poirier ose proposer un héros atypique : un cow-boy, et sa monture pas vraiment ordinaire, dont l’intégralité des aventures va être réunie dans deux superbes albums publiés par les éditions Revival. Le premier est déjà disponible !
Lire la suite...Toppi : un architecte fantastique !
Avec Toppi, le spectacle, quel que soit le sujet abordé, est total, pour ne pas dire systématiquement fascinant. Les éditions Mosquito, qui ont déjà publié de très nombreux albums de l’auteur italien, n’en finissent pas de nous faire découvrir cette œuvre incomparable, réunissant dans « Fable toscane et autres récits » cinq histoires réalisées entre 1986 et 2001…
Qu’il s’agisse d’évoquer des peuples primitifs (dans « Les choses cachées »), la légende du XIIIe siècle « Le Manteau de Saint-Martin » sur fond d’hérésie religieuse, des incendies mystérieux ou le sort de Roland, un sauveur qui se fait attendre, Toppi nous porte, nous transporte, nous perd au fil du temps. Avec sa « Fable toscane », qui occupe une trentaine planches de l’album, Toppi joue la carte du fantastique. Au cœur du récit, un charpentier minutieux et pauvre en bute avec un collecteur d’impôts. Un jour, il décide de prendre son temps et d’aller profiter de la nature avoisinante. Fatigué, il s’assoit au pied d’un arbre et s’endort. Et le temps passe, vraiment !
Henri Filippini a retracé ici-même son étonnante carrière (1). Évoquons plutôt son style si particulier. Toppi casse la primauté du cadre, rompt avec la succession des vignettes ou la linéarité de la séquence, réagit contre l’enchaînement classique des plans ou des proportions. Un simple regard suffit pour s’en convaincre : chaque page possède une architecture inhabituelle et propose, à chaque fois, un nouveau monde. L’illustrateur n’a qu’une obsession : se défaire du cadre coûte que coûte pour gagner l’espace de la pleine page. Les cases sont comme invitées à regret et les vignettes à chaque fois percées, éventrées, sacrifiées.
Ses planches constituent un fabuleux cours d’art du trait ; rien n’y manque. Les visages sont modelés de traits courts, de hachures et de contre-hachures avec ici et là des lignes de contour partielles. Ailleurs, le jeu des tracés se complique : Toppi impose formes et masses visuelles qui rythment le monde, comme une pulsation de clair-obscurs. Malgré tout, des zones blanches aèrent savamment les sombres desseins de l’artiste.
Cet album est encore une fois l’occasion d’admirer le travail de Toppi qui construit en orfèvre une scénographie graphique exceptionnelle et vertigineuse.
Didier QUELLA-GUYOT ; http://bdzoom.com/author/DidierQG/
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(1) Sur Sergio Toppi, voir aussi sur BDzoom.com : Exposition Sergio Toppi à Blois…, Adieu, Sergio Toppi…, « Le Dossier Kokombo » par Sergio Toppi, « Impérativement » par Sergio Toppi, Les tarots de Toppi, « Un dieu mineur » par Sergio Toppi, Sergio Toppi, Un peu plus à l’Ouest : la plume de Sergio Toppi, et surtout Sergio Toppi : le coin du patrimoine BD.
« Fable toscane et autres récits » par Sergio Toppi
Éditions Mosquito (18 €) – EAN : 9782352839026
Les oeuvres de Toppi donnent le vertige, son dessin éclate dans tous les sens, c’est un régal visuel! De la même trempe que Corben. Des artistes indispensables!