Les amateurs de son œuvre le savent bien : Jacques Tardi est un boulimique de travail qui dessine matin, midi et soir. Or, « Dessins matin, midi et soir », c’est le titre d’un beau petit recueil édité par Oblique Art (structure dirigée par Pierre-Marie Jamet) qui nous propose pas moins de 160 pages rassemblant des illustrations réalisées par le créateur d’« Adèle Blanc-Sec », sélectionnées dans les nombreux carnets qu’il a noircis (voire mis en couleurs) tout au long de sa remarquable carrière d’auteur du 9e art : croquis, études de personnages… et même courtes bandes dessinées iconoclastes inédites.
Lire la suite...Après le délirant atelier Mastodonte, la monstrueusement loufoque école Chihuahua…
Pascal Jousselin, Nob, Obion et Lewis Trondheim se trouvèrent fort dépourvus quand « L’Atelier Mastodonte » cessa de paraitre dans les pages du magazine Spirou et en albums. Sur le principe de l’atelier virtuel, ils reprirent rapidement leur collaboration. Le fruit de leur cogitation est un album jeunesse à l’humour loufoque et au titre improbable : « Chihuahua ». Mais de quoi Chihuahua est-il le nom ?
La rentrée des classes est toujours un moment angoissant pour les parents, mais surtout pour les élèves des petites classes. Paul ne fait pas exception, d’autant qu’il s’apprête à découvrir une nouvelle école où il ne connait personne. Sa mère s’amuse de ses terreurs en lui en rappelant qu’il a déjà peur des monstres sous son lit. Ce qui n’était qu’une boutade, se révèle étrangement prémonitoire. Le lendemain, il s’aperçoit que tous ses camarades sont des monstres : trolls, cyclopes, diables en tous genres, momies…. L’année scolaire s’annonce difficile pour le timide Paul.
Le nouvel élève est terrorisé en découvrant un établissement étrangement nommé : Chihuahua. Il semble être sur le seul humain normal alors que tous les autres rêvent de déguster de la chair humaine.
Heureusement pour lui, il fait preuve d’un bon sens de la répartie. Quand il est soupçonné d’être un humain, Paul déclare être un loup garou féroce les nuits de pleine lune.
Le voilà sauvé pour un moment, le temps de se faire de nouveau amis : Violette, une petite fille sage, mais qui redouble pour la 142e fois, et Gilbert qui est un monstre étrange : une grosse boule de poils orange qui se déplacent sur ses deux bras hypertrophiés.
Paul hallucine de plus en plus quand il visite les salles de sa nouvelle école : certains enseignants confondent salle de sport et salle de torture, au menu de la cantine il n’y a que des animaux vivants et du brocolicus, mais le brocolicus, c’est une plante carnivore bien vivace, quant aux toilettes, elles se déplacent et adorent jouer à chat perché en se réfugiant sur les branches des arbres. Et, quand on fait une balade pédagogique, ce n’est pas mieux : c’est pour traverser la forêt des âmes damnées, les âmes des pires cancres de l’école qui errent pour l’éternité en attente d’un corps à hanter. Pourquoi pas celui du tendre Paul ?
Beaucoup de surprises, aucun temps mort, dans cette BD tout public dans laquelle une espèce de Harry Potter sans talent surnaturel, – enfin jusqu’à présent -, survit apeuré dans une école peuplée d’authentiques monstres qui ne rêvent que de manger un humain. Un humour délirant et insouciant règne sur les 64 pages d’un album rafraichissant.
« Chihuahua » marque la reprise d’un atelier virtuel par des membres de feu « L’atelier Mastodonte ».
Pascal Jousselin, Nob, Obion et Lewis Trondheim dessinent tour à tour une page du livre à l’immuable gaufrier de quatre grandes cases carrées : les personnages et les décors sont donc semblables et différents !
L’histoire est constituée de gags en une page, mais évolue au fil de la lecture.
Ainsi chaque bédéaste a inventé et développé un personnage, – Nob le petit Paul, Pascal Jousselin la tendre Violette, Obion le professeur Plumier, Lewis Trondheim Gilbert, le monstre orange affamé -, que tous ont repris et incluent dans leur planche-gag.
L’ensemble en plus d’être cohérent est monstrueusement drôle : les dialogues font mouche, les situations décrites sont inventives et toujours renouvelées, les monstres dangereux finissent par nous apparaitre sympathiques.
Vivement la parution du second tome, prévue à l’automne prochain, peut-être l’occasion de comprendre le nom de l’album (Pourquoi Chihuahua ?) et de savoir si oui ou non Paul dispose de talents hors-normes.
Dans la lignée des six albums de « L’Atelier Mastodonte », le premier volume de cette nouvelle série procède d’un scénario intelligent et d’une mise en Å“uvre harmonieuse et brillante à huit mains par quatre auteurs qui s’entendent comme de joyeux larrons en foire.
Pour les plus curieux, si vous voulez percer certains mystères de ce nouvel atelier virtuel, rendez-vous sur la page Instagram AtelierChihuahua.
Laurent LESSOUS (l@bd)
« Chihuahua T1 : Une rentrée presque normale » par Pascal Jousselin, Nob, Obion et Lewis Trondheim
Éditions BDkids (9,95 €) – ISBN : 979-1-0363-2539-7