Après leur collaboration remarquée sur « Sangoma », le romancier Caryl Férey et le dessinateur Corentin Rouge retravaillent ensemble, pour notre plus grand plaisir ! Dans ce qui sera une trilogie de pas moins de 450 pages angoissantes (le tome 1 en contient déjà 150), la crise migratoire s’est amplifiée et touche désormais le continent européen victime de multiples catastrophes. D’innombrables réfugiés venus de tous pays — ayant sûrement fui les changements climatiques, les guerres ou les pandémies — s’amassent au port du Havre… Dans ce lieu de transit, ils espèrent accéder aux rares bateaux qui pourront les embarquer, via l’Écosse, en destination de l’hypothétique salut que représente l’Islande : unique contrée épargnée, mais pour combien de temps encore ?
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S’il est une guerre dont le déroulé des « événements » échappe encore à beaucoup, c’est bien la guerre d’Algérie. Et comme toute guerre, tout est question de point de vue, d’où l’importance du « Une » dans le titre « Une histoire de la Guerre d’Algérie ». Dans le cadre des Docu-BD propres aux éditions Petit à Petit, les 92 planches de bande dessinée sont opportunément entrecoupées de pages contenant compléments d’informations et documents.
Dans cette Algérie annexée militairement à la France dès 1847-1848, tout va réellement basculer avec le réveil nationaliste et les manifestations de Sétif, le 8 mai 45. Les émeutes font alors plus de 1 500 morts. Et tout a commencé, semble-t-il par un coup de feu d’un policier. Le scénario de Jean-Blaise Djian accorde une bonne place à cet épisode qui met en lumière des personnages qui seront les fils rouges de ce récit à la fois romanesque et documenté. En fin d’ouvrage, l’historien Guy Pervillé revient sur le cas de Sétif : insurrection puis répression, ou l’inverse ?
Cinq ans après Sétif, le héros, Yacine, sort enfin de prison et découvre qu’en son absence, sa famille est restée sans nouvelles de lui (les courriers qu’il a envoyés n’ont été distribués). Son épouse est décédée, son fils est parti. Plus de famille, plus de toit, juste des convictions et une énorme rage. Autour de cette famille décomposée, décimée, Djian s’attache à raconter les destins d’êtres proches qui s’unissent, s’opposent, se retrouvent, s’affrontent… tissant peu à peu le récit d’une guerre trop longtemps cachée sous le terme d’« événements » où les différents camps mèneront des combats sans merci, dont souffrira beaucoup la population civile.
Difficile de tout dire et de tout raconter d’une guerre qui dura de 1945 à 1962, d’où l’importance des double-pages documentaires séparant les chapitres et abordant plus ou moins longuement le réveil du nationalisme algérien, le début de la guerre d’indépendance et la lutte armée, le sort des deux millions de soldats envoyés sur place pour cette « sale guerre », le FLN et l’OAS, De Gaulle et la fin du conflit, l’Algérie indépendante (le sort des « pied-noirs » et des harkis auraient sûrement mérité un peu plus de commentaires).
Il faut enfin saluer le talent du dessinateur. Dessins et couleurs sont signés Sergio Alcala et c’est remarquable ! Son trait réaliste est appuyé par des coloris qui rendent étonnamment les reliefs, les volumes, qu’il s’agisse d’un visage ou d’un sol, d’un paysage lointain ou d’un objet, d’un effet de nuit ou d’une aube légère. Les ambiances, sereines ou dramatiques, et tous les effets de lumière, sont ainsi parfaitement maitrisés. Autant dire que, grâce à cette réalisation exigeante, le récit est ainsi parfaitement mis en valeur et qu’on en sort à la fois satisfait de ce qu’on vient de vivre ou d’apprendre, mais également impressionné par le spectacle offert par Sergio Alcala.
Didier QUELLA-GUYOT ; http://bdzoom.com/author/DidierQG/
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« Une histoire de la Guerre d’Algérie » par Sergio Alcala et Jean-Blaise Djian
Éditions Petit à Petit (17,90 €) – EAN : 9782380460148
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