La force des voyageurs…

Joël Alessandra est un voyageur dessinateur qui ne peut s’empêcher de croquer les gens, de capter les paysages et, ce faisant, de saisir ce qu’il y a d’humanité dans les peuples qu’ils côtoient et d’injuste dans les cultures ou les régimes politiques qui les contrôlent ou les dirigent. Avec « La Force des femmes », sous-titré « Rencontre africaines », l’auteur nous propose plusieurs de ces tranches de vie…

Comme il le précise, pour lui, ça a « commencé très tôt cette histoire de voyages », et très simplement par une photo de Depardon montrant une femme éthiopienne fascinante. Dès lors, il accepte d’effectuer son service militaire à Djibouti sur une mission culturelle et, dès lors, il est envouté par l’Afrique de l’Est, dessinant sans arrêt pour s’imprégner de « chaque parcelle d’exotisme ». On est en 1990 et le jeune Alessandra vient de découvrir un monde fascinant et des femmes mystérieuses, troublantes…

Avec « L’Homme qui répare les femmes », l’auteur évoque sa rencontre impressionnante avec le Docteur Mukwege, prix Nobel de la Paix 2018 obtenu pour son action envers les femmes violées de son pays, le Congo, pays riche où la misère est affolante. Non content de redonner à ces femmes  leur honneur et leur fierté, le Docteur Denis Mukwege a mis en place accompagnement psychologique, des aides à la réinsertion, bref, un combat de tous les instants.

Direction Bangui ensuite où alternent dessins noir et blanc  sur le vif, aquarelles impressionnistes et séquences BD pour raconter  un atelier de dessin. Dessiner mais pas écrire, c’est la consigne intransigeante de l’instituteur local vis-à-vis des filles. À Annaba, en Algérie – Alessandra a raconté dans « Petit-fils d’Algérie » (chroniqué ici-même, au même titre qu’« Errance en Mer Rouge ») les liens familiaux qui l’unissent à ce pays -, l’auteur évoque aussi le cas de cette jeune fille qui souhaiterait tant rester à l’atelier pour dessiner,  mais qui partira parce qu’il y a trop de garçons dans le groupe et trop de « pressions » autour d’elle contraignant sa liberté d’action. Alessandra raconte enfin le sort incroyable, inimaginable, d’une jeune femme dans le désert tchadien…

La force des voyageurs dessinateurs, c’est précisément d’être des observateurs qui, sans insister, sans marteler, esquissent, montrent, racontent et laissent le lecteur comprendre ce qu’on peut ou doit comprendre de ces portraits de femmes, touchantes,  émouvantes et pour lesquelles tant de combats sont à mener.

On retrouve Joël Alessandra dans un collectif publié également aux éditions Des ronds dans l’O, « Promenade de la mémoire : 14 juillet », consacré au terrible massacre provoqué par ce camion jeté sur la foule en juillet 2016. Préfacé par Boris Cyrulnik, l’ouvrage réunit six témoins de l’attentat qui racontent le drame et la douleur de ce qu’ils ont vu et subi, six douloureuses expériences portées par les dessins d’Alexis Sentenac, Edmond Baudoin, Céline Wagner, Jeanne Puchol, Alexis Robin et Joël Alessandra, lequel en dessine également la couverture.

Didier QUELLA-GUYOT ; http://bdzoom.com/author/DidierQG/

[L@BD-> http://9990045v.esidoc.fr/] et sur Facebook.

« La Force des femmes » par Joël Alessandra

Éditions Des ronds dans l’O (22 €) – ISBN : 978-2-3741-8079-3

« Promenade de la mémoire : 14 juillet »

Éditions Des ronds dans l’O (22 €) – ISBN : 978-2-3741-8083-0

Galerie

Une réponse à La force des voyageurs…

  1. BARRE dit :

    Sacré Alessandra! Mêler travail et plaisir, et découvertes exotiques, le tout en nous laissant de jolis portraits de personnes, voilà quelqu’un qui a trouvé le bon job, et la belle vie!

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