« Champignac » met à l’honneur l’un des personnages les plus généreux et des plus attachants de la galaxie « Spirou », en dévoilant son passé dans le contexte de la Seconde Guerre mondiale, avant qu’il rencontre le héros donnant son titre au journal des éditions Dupuis. Outre le fait de divertir efficacement, le but de cette série dérivée est de vulgariser des sujets scientifiques et sociologiques pour toucher les jeunes lecteurs. Dans cet encore très réussi tome 4, où un Pacôme irritable et dépressif croise d’éminents confrères de l’époque (Einstein, Feynman ou Oppenheimer, récemment mis en lumière avec le film de Christopher Nolan), les Béka et David Etien abordent, avec authenticité et psychologie, le problème de la fabrication de la bombe atomique, à laquelle notre original mycologue va inconsciemment contribuer…
Lire la suite...« Louisiana » : une flamboyante saga qui dénonce l’esclavage et les violences dont les femmes sont victimes…

Les éditions Dargaud continuent de nous proposer de nouveaux talents remarquables (1) avec, ce mois-ci, le lancement d’une épopée historique dans la lignée des romans se déroulant au sud des États-Unis du XIXe siècle (« Autant en emporte le vent », « Le Bruit et la fureur »…) due au dessinateur Gontran Toussaint et à la scénariste Léa Chretien.
Dans ce premier tome (il y en aura trois en tout), l’héroïne, héritière d’une dynastie de planteurs de Louisiane est à l’hiver de sa vie. Elle se remémore l’histoire de ses ancêtres empreinte de racisme, d’injustice sociale, de misogynie, mais aussi d’initiation au vaudou, en se confiant à sa fidèle domestique : une femme de couleur, certainement la mieux placée, d’après elle, pour comprendre ses choix et les difficultés qu’ont eues sa grand-mère, sa mère et elle-même à gérer une plantation, ce qui était complètement interdit aux femmes de cette époque.
D’emblée, le scénario nous captive, grâce à ses ambitions humanistes, à sa documentation sans faille, et à sa vision assez éloignée des images traditionnelles colportée par la légende américaine, mais aussi par la maîtrise et la subtilité de la narration et de l’écriture.
Il s’agit, pourtant, du premier scénario professionnel de la jeune Léa Chretien : une passionnée de dessin et d’histoires qui a étudié l’illustration à l’ÉSA Saint-Luc de Liège et qui a eu l’idée de « Louisiana » lors d’un voyage dans le sud des USA.
Mais ce qui se saute tout se suite aux yeux, c’est le graphisme à la fois très détaillé et vivant de Gontran Toussaint dont on ne connaissait, jusque-là que sa prestation un peu plus timorée sur le diptyque « Reporter » écrit par Renaud Garreta et Laurent Granier, chez Dargaud (en 2016 et 2017) où le texte, très dense, avait tendance à étouffer son trait.
Certes, les influences de Jean Giraud et d’Hermann (on sent que ce jeune Belge a beaucoup lu « Blueberry » et « Comanche » dans sa jeunesse) sont évidentes – personnellement, je rajouterai aussi celle d’Antonio Parras, dessinateur mythique de Pilote —, mais on sent qu’il est ici totalement en phase avec l’histoire, étant aussi à l’aise dans les passages intimistes et l’expression des visages que dans les paysages inquiétants ou somptueux des bayous et des plantations de la Louisiane.
Bref, ce galop d’essai est bien parti pour être un coup de maître : les amateurs de bonnes bandes dessinées classiques ne devraient pas passer à côté !
Gilles RATIER
(1) Voir, par exemple, tout récemment : Zola et ses deux femmes, magnifiés par deux nouvelles autrices remarquables !.
« Louisiana : la couleur du sang » T1 par Gontran Toussaint et Léa Chretien
Éditions Dargaud (14 €) — ISBN : 978-2205 — 07864-0