On vous a déjà dit tout le bien que l’on pensait de la saga ébouriffante, délirante et jubilatoire « The Kong Crew » d’Éric Hérenguel… (1) Or, voilà que les éditions Caurette sortent une très belle intégrale de luxe de la trilogie (224 pages, dans sa version originale en noir et blanc grisé et en français) : une incroyable épopée hommage aux comics, aux pulps et aux vieux films fantastiques des fifties ! Ceci alors que le tome 3, cartonné et en couleurs, vient aussi à peine de paraître chez Ankama… La totale en noir et blanc ou les trois volumes en couleurs, vous avez donc le choix ! L’essentiel étant de ne pas passer à côté de ces aventures follement drôles, débridées et imaginatives, sous couvert de fable épique et écologique !
Lire la suite...Une balade scientifique avec A.Dan…
Cinq ans après son voyage au Congo Brazzaville avec des primatologues de l’université des sciences de Rennes pour son carnet de voyage « Des Gorilles et des hommes », A.Dan rencontre de nouveaux scientifiques rennais. Pour « Les Collectionneurs de sciences », il a parcouru les collections et les réserves de l’Université Rennes 1 et échangé avec le personnel en charge de ces fonds particuliers, en vue de réaliser l’exceptionnel reportage dessiné qui paraît aujourd’hui.
A.Dan est reçu au début de son enquête par Pierre, qui lui montre la galerie de zoologie, avant de suivre Marion, la conservatrice du patrimoine et chargée des collections, géologue de formation et qui l’accompagnera dans une visite de la salle consacrée à la géologie et sa lithothèque. A.Dan rencontrera aussi Maël qui prépare des travaux pratiques pour des étudiants en CAPES, Audrey la gestionnaire des herbiers, en pleine organisation d’une campagne de numérisation, et Gaëlle la gestionnaire de la section zoologique.
Toutes ces personnes lui expliquent le rôle de cet ensemble qui, tel un ensemble de petits musées, sont là pour la transmission des savoirs et le plaisir de la découverte. Accédant aux laboratoires et aux magasins, A. Dan nous montre qu’une grande partie de l’activité de ses collectionneurs consiste aussi à répertorier, classer, évaluer et sauvegarder leurs fonds permettant à leur travail de vulgarisation et de médiation d’être complètement dans la filiation des cabinets de curiosités du 18ème siècle, dont ils ont hérités en partie des collections.
L’album « Les collectionneurs de sciences » nous entraîne par son enquête didactique dans un monde qui fait rêver, où chaque plante, animal, pierre, objet possède une histoire. Par un dessin proche du croquis incroyablement rehaussé aux crayons de couleur, à l’intégration au fil de son récit de photographies et de reproductions A.Dan rend compte, nous fait partager son émerveillement. Son ouvrage nous ramène à notre propre enchantement enfantin face aux curiosités de la Nature et au fonctionnement du monde.
BDzoom.com : Bonjour A. Dan, pouvez-vous nous parler de votre formation scientifique ?
A. Dan : J’ai un Bac+5 en Biologie, Faune Sauvage, Ethologie et Grands Mammifères et un BTS Gestion Forestière.
À quel moment le dessin est-il revenu dans votre vie ?
Il n’est jamais parti ! C’est parce que le dessin était toujours là, même lors de mes études scientifiques que cela m’a procuré des occasions d’illustrer des supports scientifiques puis de fil en aiguille d’en faire enfin mon métier.
Comment est arrivée cette proposition de reportage ?
Je crois que suite au Congo et la publication de « Des Gorilles et des hommes », les scientifiques de Rennes et le service culturel de l’université ont posé un nouveau regard sur les possibilités de vulgariser, faire de la médiation avec le dessin et plus particulièrement la BD, raconter les gens, les métiers, les choses cachées etc. En 2017 on m’a proposé de parler des collections. D’emblée j’ai dit oui… à condition de ne pas faire un simple catalogue mais bien raconter les coulisses, les pourquoi, les comment, les gens, les anecdotes.
Vous avez beaucoup dessiné pendant la préparation des « Collectionneurs de sciences » ?
Oui, sur place évidement. J’ai noté aussi toutes les infos que l’on pouvait me donner. Pour être sûr de pouvoir faire ensuite tout ce que je voulais, j’ai aussi pris des photos qui m’ont permis de travailler un peu plus de retour à la maison. Ensuite en travaillant non plus des croquis mais des planches, j’ai incorporé ou refait les dessins fait sur le terrain. 6-7 semaines sur place, puis 5-6 mois pour préparer la BD.
Une partie des collections de l’université de Rennes viennent de collections privées immenses datant de la fin du 19ème, du début du 20ème. Il existe encore de tels collectionneurs ?
Je n’en sais franchement rien mais j’imagine que non ou alors des gens très très fortunés, et très érudits. Beaucoup de cabinets de curiosités ont été confisqué lors de la Révolution Française et ont intégré les universités ou les muséums aujourd’hui. Ceci dit je connais personnellement des amateurs férus de science et qui par exemple montent des boîtes à insectes à en remplir des maisons entières. Cela doit aussi être le cas pour des passionnés de fossiles trouvés sur les plages, ou les minéraux. Pour les objets d’art et les animaux naturalisés c’est une toute autre histoire qui nécessite à mon avis pas mal de temps et d’argent.
Les protagonistes de votre enquête ne se sentent-ils pas dépassés par l’ampleur de leur travail ?
Non. Catégoriquement non: ce qu’ils m’ont dit c’est qu’ils font leur part, et tant pis si chacun n’arrive pas au bout du bout d’un classement, d’un archivage, etc. Ce qui compte c’est l’ensemble, un travail de fourmi où chacun œuvre pour l’ensemble, et où un autre prendra le relais si le temps d’une vie ne suffit pas au précédent. Ceci dit il est vrai que les moyens manquent souvent, du moins c’est ce que j’ai ressenti. Aussi on fait avec les moyens qu’on a et ce sans se soucier du temps mais bien de l’exactitude et de la patience, de façon à ce que le suivant ne soit pas obligé de tout reprendre.
Lors des formations, des médiations effectuées par Pierre, Gaëlle … vous avez repéré de futurs scientifiques, de futurs « collectionneurs » ?
Je n’en ai pas la capacité mais j’ai vu des jeunes étudiants participer à des formations qui mènent à devenir des scientifiques qui œuvreront spécifiquement pour les collections.
Le dessin, les croquis sont encore une partie importante des travaux scientifiques ?
Avant moins, aujourd’hui de plus en plus! Dans une optique de médiation, de vulgarisation, de simplification aussi. Je n’ai rencontré chez les scientifiques naturalistes et biologistes (voire des physiciens) que des gens plébiscitant ce moyen de communication. Un dessin vaut mieux qu’un long discours, et la photo a aussi parfois des limites que n’a pas le dessin (et vice versa). Et puis il existe aussi des formations dans les écoles d’arts appliqués tournées vers la didactique … preuve que le dessin scientifique a de l’avenir, en tout cas en a besoin. J’ai croisé des étudiants d’art dans les collections qui étaient là pour travailler leur dessin dans ce but.
Vous avez un pied dans les sciences naturelles mais depuis peu l’autre est dans les sciences occultes pour une série à venir autour des mandragores.
Depuis peu? En fait non, c’est plutôt l’inverse : je suis bercé depuis l’adolescence voire même plus jeune par Tolkien, les jeux de rôles, le fantastique, François Bourgeon avec ses « Compagnons du Crépuscule », Loisel et « La Quête de l’oiseau du temps », Chevalier et Segur pour « Les Contrées oubliées » etc. J’adore le fantastique, l’HF ou plutôt le médiéval fantastique et ma toute 1ère BD était dans le genre aux éditons Joker, dans la collection Horizon. Avant ça j’avais fait une histoire courte dans Lanfeust Mag, avec Benjamin Leduc au scénario, et quelques illustrations pour des journaux fantastiques.
La BD qui fait sens, voire engagée, le reportage dans un domaine que je connais bien, les sciences, oui … mais la BD a aussi le pouvoir de partir dans le pur imaginaire, une drogue que j’affectionne. Et la rencontre avec Aurélien Ducoudray tomba plutôt bien: je dirais que le courant est bien passé entre nous et que c’est autour de verres et discussions pas très sérieuses que nous avons divagué sur des histoires sans queue ni tête, évoquant Stephen King et Audiard. Puis l’envie de tenter quelque-chose est venue mais du fantastique animalier et si possible à contre-sens, avec les codes de l’Heroic Fantasy mais où les personnages principaux se prennent les pieds dans le tapis, du gore plutôt que du tendre, et le tout par épisodes, par petites touches, en gardant un plaisir intact, en ne sachant pas forcement ce que la suite donnera. « Namta » et ses histoires de mandragores est né de là.
Votre prochain projet est de nouveau lié à la recherche ?
Des scientifiques, j’espère en rencontrer lors de mon prochain reportage qui aura lieu en mai et juin 2019, période où je pars en région polaire arctique, au nord-Groenland sur un bateau nommé ATKA qui accueille des scientifiques mais pas que (artistes, pédagogues, aventuriers, sportifs, etc.). Un gros one-shot devrait faire suite à sortir fin 2020 début 2021 chez un éditeur qui s’est positionné aujourd’hui mais tant que le contrat n’est pas signé, je n’en dirai pas plus. Et puis, le Congo comme « Les collectionneurs de sciences », voire ce départ au Groenland a déjà provoqué des intérêts de la part d’anciens copains et contacts de fac : il n’est donc pas impossible que j’en concrétise quelques-uns… autour des Tortues Luth? En Guyane? Je ne sais pas encore.
Mille mercis savants à A .Dan pour sa disponibilité.
« Les collectionneurs de sciences » par A. Dan
Éditions « Des ronds dans l’O » (17€) – ISBN : 978-2-37418-059-5
Du fond (apparemment) et de la forme (superbes dessins!) Que demander de plus?