« Jacques Gipar T7 : Gaby le Magnifique » par Jean-Luc Delvaux et Thierry Dubois et « On est heureux Nationale 10 » par Laurent Carré

Avec Jacques Gipar, journaliste spécialisé dans les affaires judiciaires, ce sont des enquêtes automobiles qui priment. Ici, ça bouge, ça roule, ça se poursuit sur des routes campagnardes et sinueuses, celles des années 50, au volant de voitures mythiques, mais populaires. Le scénariste de la série, Thierry Dubois, est également passionné par l’histoire des petites routes et des grands axes des années passées. Son remarquable « C’était la nationale 7 » vient d’être rejoint par « On est heureux Nationale 10 » signé par un autre amateur du genre, Laurent Carré…

Paris-Biarritz n’est pas qu’une route qui mène les Parisiens aux bords de mer du côté de Royan ou Biarritz, c’est d’abord un axe stratégique et militaire entre la France et l’Espagne, ce que rappelle le premier chapitre évoquant tour à tour les voies romaines, les relais de la Poste Royale (XVème /XVIème siècles), la plantation d’ormes au bord des routes, les corvées pour l’entretien, le réseau télégraphe de Chappes, la concurrence des trains, les premières courses automobiles et tant d’autres évolutions historiques ou anecdotiques qui rendent à la fois passionnantes et pittoresques ces premières pages. En résumé, pour relier Paris et la côte basque, au XVIIème siècle, c’était 15 jours de trajet ; fin XVIIIème, ce ne sont plus que 5 jours et demi ; aujourd’hui, quelques heures…

Comme dans le précédent volume, « C’était la nationale 7 », avec plus de 200 pages de commentaires et de documents, retrace ville après ville, village après village, d’auberge en relai routier, toutes les étapes du trajet. Carte routières, cartes postales, bornes et panneaux de signalisation, photos d’époque de stations-service ou d’hôtels disparus, vues aériennes et monuments… appuient les explications mêlant érudition et anecdotes.  Ici et là, des développements insistent sur tel ou tel sujet : la course Paris-Madrid de 1903, les bouchons de la 10, « Passer la frontière autrefois », sans oublier les spécialités culinaires et vinicoles. C’est un éclectisme qui, après lecture, fait regarder autrement les routes qu’on emprunte, poussant la traditionnelle « lecture de paysages » d’une non moins nécessaire lecture des bords de route.

C’est « à travers le prisme des années 1950 aux années 1970 » que Laurent carré réalise ce travail incessant de collecte documentaire pour lequel il a créé un site . Une place importante est, par exemple, accordée aux vestiges des publicités murales qui, évidemment, disparaissent au fil des ravalements et des constructions, mais témoignent des modes – en particulier, l’importante présence de « réclames » pour les boissons alcoolisées ! – et constituent un patrimoine très particulier dont on mesure aussi l’importance à travers les trois pages consacrées à « La nationale 10, fille de pub ».

L’ouvrage est régulièrement illustré de dessins de Thierry Dubois qui avait, seul, réalisé ce même travail pour « C’était la nationale 7 », paru en 2012, doublé d’un album original, « La Nationale 7 en autorama ». Ce dernier titre proposait une trentaine d’illustrations représentent des paysages, des édifices emblématiques et des scènes typiques de la route nationale menant vers le sud, de Paris à la côte d’Azur, avec cartes postales et textes explicatifs complétant les dessins pleine page. Un ouvrage séduisant, spectaculaire, ludique et riche dans ce style graphique nerveux tout à fait séduisant qui a fait le succès de la série « Jacques Gipar », dont un nouveau tome vient de paraitre, « Gaby le Magnifique » mais dont les dessins sont signés depuis le début en 2010 par Jean-Luc Delvaux.

Septembre 1954 : Jacques Gipar et Petit Breton sont en route pour la Normandie et  un petit séjour vers les planches de Deauville. C’est surtout le prétexte pour le journaliste de « France-Enquêtes », à roder la nouvelle Simca Vedette qu’il a récemment acquise et l’occasion d’explorer la Nationale 13 qui relie Paris et Cherbourg (deux pages en fin d’album présentant l’une et l’autre). Tout commence avec un restaurant qui brûle et des soupçons de racket. Gipar se jette sur la piste d’une nouvelle affaire, le prétexte pour circuler en tous sens. Circulez, y’a tout à voir !

Dans la lignée d’un Tillieux et de son « Gil Jourdan », c’est à un véritable défilé de vieilles voitures françaises qu’on assiste dans des décors minutieusement reconstitués. La série, classique dans la forme et la narration, n’en reste pas moins nourrie de pages dynamisées par ces véhicules rondouillards, s’affrontant, se bignant, faisant des tonneaux, se fracassant, pour des séquences très cinématographiques.

Difficile de résister au charme de cette époque révolue, d’autant que chaque album change de région et de décors. On retrouve l’ensemble des aventures dans deux intégrales : « Premières aventures », T1 à 3, et « Aventures en grand large », T4 à 6.

Voilà donc de belles occasions de cadeaux de Noël pour les amateurs de vieilles voitures, d’histoires provinciales et de voyages en régions.

Didier QUELLA-GUYOT  ([L@BD-> http://9990045v.esidoc.fr/] et sur Facebook). http://bdzoom.com/author/didierqg/

« Jacques Gipar T7 : Gaby le Magnifique » par Jean-Luc Delvaux et Thierry Dubois

Éditions Paquet (14 €) – 978-2-8889-0950-2

« On est heureux Nationale 10 » par Laurent Carré et Thierry Dubois

Éditions Paquet (30 €) – 978-2-8889-0950-7

 

 

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