Les amateurs de son œuvre le savent bien : Jacques Tardi est un boulimique de travail qui dessine matin, midi et soir. Or, « Dessins matin, midi et soir », c’est le titre d’un beau petit recueil édité par Oblique Art (structure dirigée par Pierre-Marie Jamet) qui nous propose pas moins de 160 pages rassemblant des illustrations réalisées par le créateur d’« Adèle Blanc-Sec », sélectionnées dans les nombreux carnets qu’il a noircis (voire mis en couleurs) tout au long de sa remarquable carrière d’auteur du 9e art : croquis, études de personnages… et même courtes bandes dessinées iconoclastes inédites.
Lire la suite...« Devil Inside » T1 par Ryo Ogawa et Satoshi Obe
Si, pour les personnes ayant vécue dans les années quatre-vingt, le titre : « Devil Inside » leur rappelle une chanson incontournable du groupe australien INXS, pour la génération actuelle elle évoquera également une série de manga. Meurtre, monstre et suspens sont au programme de ce thriller.
Étudiant brillant et adulé par ses camarades, Jun est pourtant un jeune homme solitaire. À la mort de ses parents, il a hérité d’une immense maison qu’il habite, entouré d’une armée de serviteurs. Froid et distant, il est pourtant proche d’une soubrette de son âge avec qui il partage une passion pour les jeux vidéo. C’est son frère, Akira, plus âgé que lui, qui a pris les rênes de l’entreprise familiale. Élève extrêmement doué, il a une faculté d’analyse qu’il met de temps en temps au service de la police, afin de résoudre des enquêtes complexes. Mais Jun a aussi au fond de lui un monstre qui n’attend qu’un signe pour se réveiller.
Tous les ingrédients traditionnels d’un polar sont réunis dans ce manga. Le héros étant un adolescent, cela permet aux lecteurs du même âge de s’identifier à lui et de vivre par procuration le mal-être de cet âge ingrat qu’ils traversent. Bien évidemment, il est facile de faire le parallèle entre ce manga et d’autres séries policières célèbres comme « Death Note » ou « Monster ». Le graphisme de Roy Ogawa reprenant d’ailleurs un peu des deux œuvres, sans pourtant obtenir la finesse du dessin d’Obata ni la force du trait d’Urasawa.
L’histoire de « Devil Inside » est menée tambour battant, tellement son scénario est dense en rebondissements. Avec seulement trois volumes prévus, cette série où se côtoient des êtres diaboliques ainsi que des meurtriers assoiffés de vengeance va vite. Le lecteur est constamment tenu sous tension une fois les premières pages d’introduction, assez paisibles, passées. Il est difficile de savoir où se situe le bien et où se situe le mal. Les fausses pistes sont nombreuses et le suspens bien amené. Bien que violente, cette histoire ne tombe pas dans l’écueil facile des représentations gore et exagérées des différents meurtres. Si rien n’est caché, le dessinateur sait choisir ses angles pour faire montrer la tension sans provoquer le dégoût.
Cette histoire n’évite néanmoins pas le fan service et les sous-entendus. Dès qu’est apparue l’amie d’enfance de Jun qui est employé comme servante et habillé d’une tenue de soubrette, il était évident que des situations équivoques allaient être mises en place pour satisfaire le lectorat masculin. Mais ces situations sont surtout là pour détendre l’atmosphère qui serait sinon bien pesante. Et finalement, il n’y a aucune scène vraiment osée, comme il est courant d’en trouver dans les séries pour ados. Ce sont surtout des doubles sens qui servent le récit et qui le pimentent avec subtilité.
Destiné à devenir un monstre, Jun va entraîner le chaos autour de lui. Les amateurs de polar un peu violent seront servis. Les meurtres sont au rendez-vous et l’enquête qui s’annonçait facile va aller de rebondissement en rebondissement. De quoi se torturer l’esprit sans trop se remonter les tripes.
Gwenaël JACQUET
« Devil Inside » T1 par Ryo Ogawa et Satoshi Obe
Éditions Komikku (7,99 €) – ISBN : 978-2372873383