« Lucha » par Annick Kamgang et Justine Brabant

Sous-titré « Chronique d’une révolution sans armes au Congo », l’ouvrage fait le point sur ce que tente une partie de la jeunesse, pour faire bouger les choses dans un pays qui a déjà connu plusieurs conflits extraordinairement meurtriers. Lucha, c’est le nom d’un mouvement pacifique de contestation et de revendications né en janvier 2012 à Goma…

Qui dit contestation dit oppression, et c’est par cet aspect de la situation que commence cet album. Les pays où dominent injustice et corruption ne connaissent que la répression. On y consacre beaucoup d’argent à des polices, des milices et autres services de renseignements intérieurs plutôt que de satisfaire les besoins élémentaires de la population : l’eau, l’électricité, l’éducation, la liberté… Au Congo, des jeunes ont d’abord choisi de se battre pour cette nécessité-là, l’accès à l’eau. Quoi de plus naturel, de plus fondamental ? !

Mais l’ex-Congo Belge (territoire royal esclavagiste) et ex-Zaïre, est un pays grand comme l’Europe occidentale, un pays qui n’a pas connu de paix durable depuis des dizaines d’années. De Mobutu à Kabila, la succession des despotes n’y règle évidemment rien, bien au contraire ! En République démocratique du Congo (ironie du vocabulaire !), on compte désormais des millions de morts et des millions de gens déplacés !

De fait, toute revendication, toute contestation, sont dangereuses et les actions de la Lucha qui trouve des échos avec « Le Balai citoyen » burkinabais ou le « Y’en a marre » sénégalais, sont courageuses. Les militants sont emprisonnés, maltraités, torturés pour avoir « simplement » discuté de l’accueil inégalitaire à l’école, dans un pays où elle est finalement payante (avec la « bénédiction » de l’église catholique qui s’enrichit des « primes » parentales).

La préface de la  chanteuse et artiste béninoise Angélique Kidjo rappelle que « face à l’ampleur des blessures de l’esclavage et des dégâts de la colonisation », il reste beaucoup à faire et l’actuelle « Ambassadrice de conscience d’Amnesty International » ne peut que saluer ces jeunes et leurs mouvements pacifiques militant pour un monde meilleur. En postface, c’est Fadel Barro, coordonnateur du mouvement Y’en a marre qui apporte sa contribution et souligne combien aujourd’hui pour les jeunes Africains, c’est malheureusement « Kalach contre slogan citoyen » et que l’Afrique « régresse du point de vue  de la démocratie, des libertés et de la justice sociale », mais que des jeunes déterminés et pleins de bonne volonté peuvent faire avancer la société.

La dessinatrice Annick Kamgang (dont c’est le premier album) et la journaliste Justine Brabant signent donc là un récit entre histoire et reportage, qui constitue un état de lieux pédagogique et documenté qui doit faire réfléchir.

Didier QUELLA-GUYOT  ([L@BD-> http://9990045v.esidoc.fr/] et sur Facebook).

http://bdzoom.com/author/didierqg/

« Lucha » par Annick Kamgang et Justine Brabant

Éditions La Boite à Bulles (14 €) – ISBN : 978-2-8495-3303-1

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