« Champignac » met à l’honneur l’un des personnages les plus généreux et des plus attachants de la galaxie « Spirou », en dévoilant son passé dans le contexte de la Seconde Guerre mondiale, avant qu’il rencontre le héros donnant son titre au journal des éditions Dupuis. Outre le fait de divertir efficacement, le but de cette série dérivée est de vulgariser des sujets scientifiques et sociologiques pour toucher les jeunes lecteurs. Dans cet encore très réussi tome 4, où un Pacôme irritable et dépressif croise d’éminents confrères de l’époque (Einstein, Feynman ou Oppenheimer, récemment mis en lumière avec le film de Christopher Nolan), les Béka et David Etien abordent, avec authenticité et psychologie, le problème de la fabrication de la bombe atomique, à laquelle notre original mycologue va inconsciemment contribuer…
Lire la suite...« Giant »T2 par Mikaël

Aux États-Unis, à New York, au début des années trente, dans ce monde qui voit haut, qui voit loin, il y a ces immeubles qui se mettent à gratter le ciel, et puis des hommes sans vertige qui nous le donnent ; des géants, enfin, des colosses… aux pieds d’argile. C’est le cas de Dan, le héros de ce diptyque, un Irlandais qui se laisse aller à une faiblesse qui lui revient comme un boomerang. Et le boomerang s’appelle Mary Ann…
Philippe Tomblaine a interviewé ici-même l’auteur de cette histoire qui expliquait ce qui avait motivé cette intrigue aux personnages incroyablement attachants. Comment ne pas s’émouvoir de cet ouvrier costaud qui, pour ne pas faire de peine, préfère ne rien annoncer à la veuve et lui écrire comme s’il était son mari ?… Sans imaginer que cela déclencherait une correspondance et qu’elle se déciderait à venir le rejoindre aux États-Unis.
Philippe Tomblaine rappelait aussi fort justement que ce contexte historique avait été souvent traité en bande dessinée, donnant sur la situation des ouvriers et sur quelques photographiques mythiques d’utiles renseignements. Mais le trait est virtuose, les décors urbains sont fascinants, époustouflants même, et le tout coloré admirablement, il fallait y revenir ! Alors qu’il sait à la perfection proposer des vues hyper documentées, de tel ou tel chantier ou de tel ou tel quartier, Mikaël a également une maitrise savante du clair-obscur. Il sait, d’une part, ne pas s’embarrasser de décors pour mettre en avant des personnages, comme éclairés de l’arrière par des ciels blancs, ou, d’autre part, aligner des avenues ou des immeubles débouchant sur des clartés surréelles qui magnifient les premiers plans. Mikaël aime ainsi à faire flotter des constructions ou des vues urbaines les pieds nageant dans le brouillard. Il y a comme de fréquentes étuves cerclant les gratte-ciels, les couvrant, les cachant…
On le sent également hanté par les perspectives infinies, vertigineuses comme ces personnages installés sur des poutres métalliques au-dessus du vide, maniant la perspective exacerbée vers les sols où ils pourraient s’écraser ou vers l’horizon, étale, d’où tous ces travailleurs migrants rêvent peut-être de repartir.
Du coup, comme on peut le vérifier sur l’encrage de la couverture ci-dessus, ses noirs sont profonds, pesant quand c’est nécessaire, appuyant lourdement les scènes inquiétantes, le tout consolidé par ces vides lumineux dont on a parlé ou par ces hachures qui glissent le long des façades, l’ensemble baignant dans des sépias plus ou moins marron, plus ou moins rouge, plus ou moins verts quelquefois, étrangement, efficacement. Et pour une très belle histoire !
À noter pour la première édition un cahier de huit pages de croquis et inédits.
Didier QUELLA-GUYOT ([L@BD-> http://9990045v.esidoc.fr/] et sur Facebook).
http://bdzoom.com/author/didierqg/
« Giant » T2 par Mikaël
Éditions Dargaud (13,99 €) – ISBN : 978-2-5050-6953-9