« Chibanis : de l’immigré au chibani » Collectif

Chibani est le terme affectueux pour désigner les Algériens venus après la Seconde Guerre mondiale travailler en France, c’est-à-dire chez eux puisque l’Algérie, jusqu’en 1962, était française. Cela veut dire littéralement cheveux blancs et cet album retrace leurs parcours, illustrés par des auteurs de bande dessinée…

Sous la couverture signée Hermann et la direction d’Yves Frey, l’ouvrage constitue le catalogue et le prolongement de l’exposition temporaire et itinérante « De l’immigré au chibani », réalisée en 2017 et qui fut, lors du Salon Bédéciné d’Illzach, complétée par les illustrations que nous retrouvons ici. 25 dessinateurs parmi lesquels Bergèse, Carali, Ernst, Lereculey, Maester, Mezzomo, Mitton, Rollin, Turg, Uderzo, Wagner… sont venus soutenir l’opération en appuyant de leurs dessins, réalistes ou humoristiques, les différents thèmes abordés.

Le catalogue constitue ainsi une synthèse pertinente et documentée, s’appuyant sur des témoignages de ces anciens qui se sont installés, notamment en Alsace. Comme il est dit, « Les chibanis sont aujourd’hui des personnes âgées, marquées par les années d’exil et des conditions de vie difficile » dont il est nécessaire de recueillir le témoignage, à la fois par « hommage légitime » et par « enjeu de transmission ».

L’ouvrage revient ainsi sur les différentes périodes où l’hexagone les a accueillis en tant qu’« indigènes », puis « Français musulmans d’Algérie » puis « Français musulmans » (selon qu’on était avant 1944, avant 1962 ou après), mais il s’intéresse surtout à la situation en Algérie qui a poussé tant d’Algériens à traverser la Méditerranée pour trouver du travail. Ce que la France a fait sur place et ce qu’elle n’a pas fait, en termes de scolarisation ou d’exploitations des terres, aboutit  à ce qu’en 1954, un million de personnes (sur 8,5 millions d’habitants !) se retrouve sans emploi et dans une situation de misère, notamment dénoncée par Camus dès 1945.

Le choix de l’exil : partir seul ou en famille, devenir ouvrier en usine, vivre dans des logements très précaires… voilà ce à quoi doivent se résoudre,  à l’époque, les chibanis qui, de nos jours, ont toujours des difficultés pour faire valoir leurs droits, notamment à la retraite.

Face à chaque sujet abordé, les dessins pleine page des auteurs de bande dessinée apportent un éclairage complémentaire : scènes de vie dessinées par Carin, Lereculey ou Pierret ; attendrissants chibanis de De vita ou Ernst ; superbes artisans signés Gajic ou Smudja… Cet ouvrage rappelle évidemment l’album « Maria et Salazar » de Robin Walter que nous avons chroniqué ici-même, la semaine dernière, sur la main d’œuvre venant du Portugal…

Didier QUELLA-GUYOT  ([L@BD-> http://9990045v.esidoc.fr/] et sur Facebook).

http://bdzoom.com/author/didierqg/

« Chibanis – De l’immigré au Chibani » par Collectif

Éditions du Long Bec (15,50 €) – ISBN : 979-1- 0924-9965-0

Galerie

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