« Le Chien de dieu » par Jacques Terpant et Jean Dufaux

S’attaquer au personnage de Louis-Ferdinand Céline n’est pas une mince affaire. Seuls deux auteurs confirmés, comme Jean Dufaux et Jacques Terpant, pouvaient relever le défi. Ce portrait chaleureux et fidèle devrait combler les inconditionnels de l’écrivain.

En 1960, à Meudon, l’orage se déchaîne dans l’humble maison du docteur Louis-Ferdinand Destouches. À l’étage, Lucette donne un cours de danse à ses élèves. Au-dessous, Céline travaille sur le manuscrit de « Rigodon », ouvrage qui clôturera la trilogie allemande, après « D’un château l’autre » et « Nord ». Soudain, au coeur de la tempête, surgit dans le jardin le jeune maréchal des logis Destouches, du 12° cuirassiers, survivant de la grande boucherie de 1914.

Cette vision fantomatique, venue du passé, déclenche chez l’écrivain usé par la maladie les souvenirs bons ou mauvais parmi les plus forts de sa chienne de vie : le médecin au service des plus pauvres, l’écriture de « Voyage au bout de la nuit », un ouvrage d’abord refusé par tous les éditeurs et enfin publié par Denoël, ses rencontres épiques avec Gaston (Gallimard) le radin, son éditeur, son amitié avec l’actrice Arletty, Élisabeth Craig (son premier amour,) son antisémitisme resté dans la mémoire collective, ses dérives pendant la Seconde Guerre mondiale, sa fuite à Sigmaringen, sa rencontre avec Lucette la jolie danseuse, son grand amour qui l’a protégé du monde extérieur jusqu’à sa mort le 1° juillet 1961…

Ces plongées dans le passées sont entrecoupées par des séquences contemporaines, qui rendent le personnage profondément humain : ses vêtements usés qui le font ressembler à un clochard, la consultation d’une enfant juive élève de Lucette, l’aide portée à une jeune fille et à son ami blessé fuyant la police, la visite surprise d’Arletty et de Michel Simon… Entre réalité et fiction, l’écrivain génial et l’ardent antisémite, personnage complexe et brillant, revit au fil de ce récit qui ne laisse pas indifférent.

Après s’être amusé de belle manière avec la grande et petite Histoire, Jean Dufaux revient à sa passion première pour la littérature. Après « Balzac » (avec Joëlle Savey), « Hemingway » et « Hammett » (avec Marc Malès), « Sade » (avec Griffo), « Pasolini » (avec Massimo Rotundo), c’est au tour de  Céline d’entrer dans son panthéon.  D’une écriture fluide et inspirée, il se fond dans les textes de l’écrivain empruntés aux « Romans » tomes I à IV.

Jacques Terpant, né en 1957, appartient au trio de stéphanois qu’il formait avec Chaland et Cornillon (il leur rend un discret hommage dans l’album) dans Métal hurlant. C’est après une carrière en dent de scie, entre publicité et BD, qu’il se fait remarquer avec l’adaptation des romans de Jean Raspail. Son trait réaliste dégage une chaleureuse humanité qui épouse avec justesse le scénario de Jean Dufaux. Un bel objet (72 pages couleurs, format 23 x 32,5) à la présentation sobre. Il existe un tirage de tête, limité à 500 exemplaires, proposant en complément un cahier d’illustrations.

Henri FILIPPINI

« Le Chien de Dieu » par Jacques Terpant et Jean Dufaux 

Éditions Futuropolis (17 €) – ISBN : 9782754820912

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Une réponse à « Le Chien de dieu » par Jacques Terpant et Jean Dufaux

  1. daniel bardet dit :

    Salut Henri, l’homme qui sait reconnaître le « bel ouvrage » pas vrai ?

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