« Tokkô Zero » par Yukai Asada et Tôru Fujisawa

Quand il n’évoque pas les loubards des collèges dans « GTO », Tôru Fujisawa scénarise des mangas mélangeant action, violence et paranormal. Aujourd’hui, il poursuit la saga « Tokkô » en s’associant avec un jeune dessinateur… et ça change tout ! Si le premier triptyque de cette série n’avait rien d’exaltant, cette suite, en quatre parties, et bien que cumulant un certain nombre de clichés clichés, est réellement captivante.

Tout débute en 1967, quand un groupe d’ouvriers découvre un accès secret vers une pièce au décor lugubre. Une petite boîte à l’aspect précieux et inoffensif trône sur un meuble. Mais, dés que l’un des ouvriers s’en saisit, une sorte de serpent démoniaque et démesuré en surgit et le décapite d’un coup de mâchoire !  Ce préambule annonce la couleur : le lecteur va voir défiler des monstres des plus effrayants au fil des pages.

Mais l’histoire qui nous intéresse se situe dans les années 2000. Ryoko, l’héroïne, est une jeune policière qui a la particularité de voir les esprits qui rodent autour d’elle. Bien sûr, sa collègue ne se rend compte de rien, matière à de nombreuses situations cocasses donnant un ton jovial à cette aventure au fond plutôt glauque. Après son service et alors qu’elle se repose sur un banc public, Ryoko est témoin d’un combat bien étrange entre un jeune homme et des mannequins qui ont mystérieusement pris vie. Ryoko décide de porter l’inconnu, affaibli par le combat, qu’il a remporté,  jusque chez elle pour le soigner. C’est là qu’elle s’aperçoit que ses blessures guérissent avec une rapidité hors du commun.

L’homme se présente comme étant Hayato et explique que son corps, couvert de tatouages, représente les 20 premières pièces de la boîte de Druj : celle-là même trouvée par les ouvriers en 1967. Elle se serait séparée en 108 parties, qui, une fois rassemblées, permettraient à son porteur de disposer  d’un pouvoir incommensurable. Inévitable hic : les gangsters qui se sont emparés d’autres pièces dont ils se servent pour semer la terreur. La présence d’Hayato, les empêchant de rassembler l’ensemble des morceaux de ce puzzle, est donc particulièrement gênante. En aidant ce bel inconnu, la jeune policière s’est donc mise en grand danger !

On l’aura compris, le scénario abuse des clichés, ce qui n’est pas un problème car le lecteur n’est pas là pour découvrir une oeuvre d’une grande originalité. Non, Il est là pour les scènes de baston et surtout une construction narrative qui rend tous ces enchaînements de plans jubilatoires. On se prend même à sourire, lorsque le grand méchant, affublé d’une tête de chien à la place du bras droit, se tient debout dans l’entrée, tel un Bad Boy. Plus cliché, ce n’était pas possible. Mais justement, ça marche, on se prend au jeu et on en redemande. Les gentils sont trop gentils et les méchants, vraiment méchants. Il n’y a pas de demi-mesure. Le dessin de Yukai Asada y est pour beaucoup, car il s’adapte en fonction du type de scène. L’ouverture avec les deux policières est traitée de manière frivole, comme l’aurait fait Kôsuke Fujishima dans sa célèbre série « Taiho shichauzo » (« Your Under Arrest » chez Manga Player puis Pika). Il emprunte également le trait lisse en clair/obscur d’Atsushi Kamijo, célèbre auteur de la série « To-Y », malheureusement indisponible en français, pour les scènes où Hayato devient guitariste de rock. Et pour les planches un peu glauques, on ne peut que penser au trait de Tajima Sho-U et notamment sa série «  MPD Psycho » (également chez Pika) aux graphismes dérangeants de réalisme. Quant aux yakuza, ils sont directement inspirés par l’univers de Tôru Fujisawa. Un mélange qui pourrait paraître déroutant, mais qui s’intègre parfaitement les uns avec les autres tout en renforçant le côté cliché de l’histoire.

À noter que Pika profite des 20 ans de la série phare de Tôru Fujisawa pour rééditer « GTO », sous une nouvelle présentation avec un logo redessiné. « Your GTO », désormais sous forme de volume double, profite également de ce lifting. Et surtout, un nouvel opus se déroulant dans l’univers du professeur loubard est également disponible en un volume autoconclusif : « GTO Bad Company ». Un gros pavé de 256 pages pour un prix très correct de 7,50 €. De quoi prolonger le plaisir des anciens lecteurs ou offrir une porte d’entrée pour les nouveaux.

Si vous affectionnez l’univers un peu déjanté de Fujisawa, même si vous n’avez pas déjà lu « Tokkô », vous apprécierez ce manga qui est soutenu par un dessin qui dynamise une histoire très rock’n roll.

Gwenaël JACQUET

« Tokkô Zero » par Yukai Asada et Tôru Fujisawa
Éditions PIKA (7,20 €) – ISBN : 978-2811633561

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