« Le Marathon de New York à la petite semelle » par Sébastien Samson

S’il y a une course mythique, c’est bien le marathon, et plus encore celui de New York où se retrouvent tous les ans 50 000 participants avides d’affronter le bitume… et soi-même. Les athlètes confirmés n’y viennent pas par hasard, ce qui n’est pas le cas de beaucoup d’apprentis marathoniens qui se lancent un défi. Sébastien Samson en sait quelque chose…

Si Samson (avec un nom pareil on ne peut que chercher la force qui est en soi !) se met un beau jour à courir, lui qui préfère se la couler douce quand il se promène et aime par-dessus tout s’installer confortablement pour dessiner, c’est parce que son épouse et quelques amis sont coureurs et qu’au coin d’une phrase et entre deux bouchées d’un bon repas, le voilà lâchant qu’il les accompagnerait volontiers s’ils décidaient de faire le Marathon de New York… C’était dit ! Mais il fallait joindre le geste (et la jambe !) à la parole. Une autre paire de manches (et de baskets !). Mais, trop tard, Sébastien Samson ne peut plus revenir en arrière ! Le piège se referme.

Alors Samson attaque le problème à bras le corps, « à flan de malaise » comme il dit, celle de Longues-sur-Mer où il va désormais s’entraîner (et se traîner, au début, il faut bien l’avouer). Avec humour et détermination, il s’autocritique et ne lâche rien. Finie l’époque où il était supporter en touche de sa Rosalie ; à présent, elle devient sa coach à domicile et « l’inoculation diffuse et lente du virus » de la course fait peu à peu son job ! Le plaisir de courir s’invite à table et l’idée d’en faire un reportage en BD, s’impose. Samson est motivé ! New York, tu vas voir ! To run, c’est fun !

Dans son corps, une compagnie d’ouvriers à casquettes, qui jusque-là hibernaient mollement, se met au travail en salle des machines. On les retrouve régulièrement dans les moments délicats, car imposer à un corps sédentaire une telle révolution n’est pas sans conséquence et Samson s’en amuse avec cette brochette de travailleurs manuels qui s’activent, s’énervent, paniquent, avisent ou le dopent. Il y a d’ailleurs beaucoup d’humour, de bons mots et des séquences hilarantes dans cet album (la séance « kiné » ou le passage à la douane restent des moments mémorables) et, adeptes du footing ou non, tous les lecteurs apprécieront.

Et puis il y a New York, tout de même ! Et Manhattan ! Avant d’y frotter ses pieds, on lève les yeux pour en admirer tout ce qui gratte le ciel et titille l’imagination. On visite de l’Hudson River à Chinatown, on révise les quartiers limitrophes (Brooklyn, Queens, Bronx…), bref, on est momentanément touriste, car demain est un autre jour. Au petit matin, la caméra frontale est en route, c’est parti, le pont Verrazano mythique bientôt franchi… Yapluka ! La fête commence, mais « combien de temps l’effet lune de miel dure-t-il ? » se demande l’impétrant !

La réponse est dans ces pages qui prouvent que l’ambition n’est pas un vain ni un vilain mot et qu’il faut puiser en soi pour atteindre son rêve, avec l’aide des amis et des proches d’abord, puis porté par la force sourde qui émane des autres « runners », enfin soutenu par un public indéfectible. Pas question de marcher, pas question de flancher ! Des douleurs souvent inconnues, le mur des 30 kilomètres, « la solitude du coureur de fond », l’épuisement mental… qu’importe, il faut s’accrocher pour ne pas décevoir, SE décevoir.

De son trait caricatural pour les personnages et beaucoup plus précis pour les décors, Sébastien Samson réalise un reportage (on devrait dire un road-movie, finalement) à la fois très sympathique et stimulant. L’auteur, d’ailleurs, a depuis récidivé, comme quoi !

Rappelons que Sébastien Samson a signé, en 2010, à la Boîte à bulles également, sur scénario de Patrice Guillon, « Le Journal d’une bipolaire » ou la chronique intimiste et poignante de la maniaco-dépression à travers les difficultés du malade et les angoisses de son entourage familial face aux brusques variations de l’humeur. Bipolaire, on l’est incontestablement au cours d’un marathon, mais le remède est connu : il faut arriver pour retrouver le sourire.

Didier QUELLA-GUYOT  ([L@BD-> http://9990045v.esidoc.fr/] et sur Facebook).

http://bdzoom.com/author/didierqg/

 « Le Marathon de New York à la petite semelle » par Sébastien Samson

La Boîte à bulles (24 €) – ISBN : 978-2-84953-266-9

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