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Rouge Éclipse T1 par Kawabata Shiki

25/09/2016
Par Gwenaël Jacquet

Ayumi est aux anges ! Pour la première fois, elle a un petit ami. Shirô vient de lui faire sa déclaration et leur premier rendez-vous est déjà fixé. À peine arrivée sur les lieux, elle reçoit un coup de fil d’une de ses camarades de classe : Zenko Uminé. Celle-ci l’exhorte à ne pas la quitter des yeux, alors qu’elle se trouve perchée en haut d’un immeuble. Ayumi comprend vite la gravité de la situation, mais impuissante, elle observe sa camarade se suicider.

Tombée dans les pommes sous le choc, elle se réveille à l’hôpital. Elle ne comprend pas bien la situation, surtout qu’elle n’était pas vraiment amie avec Uminé. En fait, elle ne la connaissait presque pas. Cette jeune fille, boulotte, passait inaperçue aux yeux de ses camarades. Du coup, elle est prise de panique lorsqu’elle constate que son corps n’est plus le sien, sa camarade le lui a volé. Aux yeux de tout le monde, elle n’est plus la douce est jolies Ayumi, mais la disgracieuse Uminé. Elle a tout perdu, du moins, c’est ce qu’elle pense. Loin d’être résignée, elle va chercher à comprendre comment ce sortilège a pu se produire et, surtout; comment l’inverser ?

Akatsuki est une ville privilégiée du Japon où se déroule régulièrement un phénomène inhabituel. Du fait de sa position par rapport au soleil, la lune devient de temps en temps rouge en plein jour. Et c’est durant cette période qu’a eu lieu l’échange. Mais comprendre les conditions de ce tour de passe-passe ne va pas la faire réintégrer son corps. Déjà, est-ce possible ? Pas si sûr.

Les éditions Akata vont toujours dans le sens de leur ligne éditoriale en sortant un nouveau titre traitant du malaise sociétal de la jeunesse. Des difficultés d’intégration dans un groupe d’amis à la maltraitance des personnes hors normes, tout y est évoqué de manière simple et directe. Ce monde, où l’héroïne devient le vilain petit canard, va complètement bouleverser la perception d’Ayumi. Il faut bien l’admettre, elle avait été gâtée par la nature. Son corps élancé et sa joie de vivre attiraient tous les regards. Elle avait une vie assez facile et c’est ça qu’enviait Uminé. Mais ce que cette dernière ne comprenait pas, c’est que l’on se crée son image : on est ce que l’on fait, nos actions et notre savoir-vivre régissent notre place dans la société. Aujourd’hui, même si elle n’a plus son corps, Ayumi est toujours la battante enjouée qu’elle a toujours été. Et ça, certaines personnes vont vite le remarquer. Même si elles ne comprennent pas forcément cette histoire de changement corporel, elles voient bien que la nouvelle Uminé est différente et très attachante. Avec son grand cœur, elle va affronter la vie telle qu’elle se présente, mais va tomber des nues quand elle comprendra que son soi-disant petit ami préfère rester avec la jeune fille désagréable qui accapare son corps. Comme quoi le physique est tout pour certains. C’est dans ces moments que l’on découvre qui sont ses véritables amis et les personnes dignes d’intérêt.

Très bien dessiné dans un style shôjo immédiatement reconnaissable, ce manga devrait logiquement offrir un panel varié de personnages. Pourtant, seuls les corps d’Uminé et de sa mère sont véritablement différents des autres acteurs longilignes. Comme s’il n’existait que deux stéréotypes dans la vie. Néanmoins, le lecteur ne se perd pas entre les différents protagonistes de cette intrigue surréaliste. C’est la force du scénario (qui montre le caractère trempé de la jeune fille) qui fait la différence. Le montage est dynamique et l’auteure ne nous perd pas en digressions inutiles. Il faut dire que cette histoire doit se conclure en trois tomes, il n’y a donc pas de quoi traîner.

Voilà un sujet classique mêlant une petite dose de fantastique avec une grosse dose de sentiments. Les amateurs de shôjo et de triangle amoureux vont adorer ce nouveau manga qui offre, en plus, une bonne réflexion sur notre place dans la société et l’image que nous donnons de nous même. Un titre à dévorer tout en gardant un œil critique sur la société.